Indice de réparabilité : deux ans après sa mise en place, un premier bilan critique

Un plan d’action pour l’économie circulaire a été voté par le Parlement européen en février 2021 dans le but d’atteindre une économie neutre en carbone, durable, non toxique et entièrement circulaire d’ici à 2050. Une des priorités de ce plan – qui s’inscrit dans une stratégie initiée par de nombreuses directives et décrets du Parlement européen, notamment la directive 2012/19/UE – est de réduire les déchets d’équipements électroniques et électriques.

D’après le rapport « The Global E-waste Monitor 2020 », la quantité de déchets liée aux équipements électriques et électroniques (EEE) a bondi de 44,4 Mt en 2014 à 53,6 Mt en 2019 (soit 7,3 kg par habitant) et devrait atteindre 74,7 Mt d’ici à 2030. Soit une hausse de 21 % en 5 ans et de presque 70 % en 15 ans. Parmi les causes avancées de cette augmentation, la consommation grandissante d’EEE, leur court temps de vie et le manque de solutions pour les réparer.

L’indice de réparabilité, c’est quoi et pourquoi ?

L’initiative française d’indice de réparabilité déployé le 1ᵉʳ janvier 2021 entend répondre à ces défis en sensibilisant les consommateurs à la réparation et en incitant les fabricants à l’écoconception.

Affiché sur les produits, l’indice prend la forme d’une note sur 10 et d’un pictogramme coloré dépendant du score obtenu – rouge pour les équipements ayant une note inférieure ou égale à 1,9 ; orange, jaune, vert clair et vert foncé, jusque 3,9, 5,9, 7,9 et 10, respectivement.

Illustration de l’indice de réparabilité.
Fourni par l’auteur

Afin de calculer cet indice, cinq critères sont utilisés : la disponibilité de la documentation technique ; la démontabilité et accès, outils, fixations ; la disponibilité des pièces détachées ; le prix des pièces détachées ; et des critères spécifiques à la catégorie du produit.

Le score de 700 équipements analysé

En mai 2022, nous avons analysé les scores de plus de 700 équipements électroniques dans trois catégories de produits : les téléviseurs, les smartphones et les ordinateurs portables, qui sont les appareils électroniques avec le potentiel de réparabilité le plus important comparé, par exemple, aux lave-linge qui atteignent un bien meilleur taux de réparation – bien qu’améliorable également. Les données (prix de vente, marque, modèle, indice de réparabilité, score de chaque critère et sous-critère) ont été récoltées à partir du site Internet de la société Darty.

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Cette analyse nous a permis de constater que, malgré l’obligation depuis le 1er janvier 2021 de rendre disponible le score lors de la vente de l’équipement, certaines marques n’ont pas encore fourni celui de leurs produits, et que certains arborent un score unique pour toute la gamme de produits. La grille de calcul de score est ainsi remplie de façon globale sans inclure les spécificités de chaque bien, ce qui pose question compte tenu de la faible standardisation des pièces détachées.

La majorité des scores obtenus par les marques pour leurs différents produits sont en outre supérieurs à 5, ce qui montre un manque d’efficacité dans l’utilisation de l’échelle complète et de sanction en cas de mauvais score sur un ou plusieurs critères. L’utilisation d’une moyenne arithmétique pour calculer l’indice final conduit en effet à ce que de bons scores sur certains critères compensent les mauvais scores sur d’autres.

Les smartphones et ordinateurs portables obtiennent ainsi de bons indices de réparabilité malgré la faible disponibilité des pièces détachées, qui rend souvent leur réparation impossible.

Encore des freins à lever

À ce jour, la politique en matière de pièces détachées est un élément clé dans la réparation des appareils défectueux : les grandes disparités observées dans les scores finaux des appareils proviennent en premier lieu de la politique des marques en matière de pièces détachées.

Une documentation claire et accessible, indispensable aux réparateurs, est par ailleurs encore trop souvent difficile à obtenir auprès de certaines marques. La pédagogie dans le milieu de…

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Auteur: Nicolas Roisin, Ph.D. Student, Université catholique de Louvain (UCLouvain)