À propos des recrutements dans l’enseignement supérieur et la recherche.
L’autrice de ce témoignage est docteure en sciences humaines. Depuis plusieurs années, elle tente d’obtenir un poste de titulaire dans l’enseignement supérieur et la recherche.
J’ai malgré moi réussi à me lever, après une nuit sans sommeil. Et je me retrouve, seule, face à mon bol de thé, en pleurs, et suffocante. Des étudiant·es, je le sais, se préparent pour venir en cours, et je sais également que je ne supporterai pas d’annuler ma vie ce jour-là. Pourtant, je suis complètement détruite. Vu de l’extérieur de ce microcosme, cela peut paraître délirant de se mettre dans des états pareils. Tout ça pour un entretien d’embauche.De ces états, nous en parlons peu entre nous, et quand nous en parlons à des proches, nous espérons qu’ils le garderont pour eux. Nous savons que paraître équilibré·e, toujours sympa et amical·e, c’est beaucoup plus bankable.
Nous en parlons tellement peu – entre nous, car les psys, elleux, se régalent et refont régulièrement leurs cuisines grâce au vivier de personnes en souffrance de notre milieu professionnel – que nous finissons par percevoir ces états d’extrême vulnérabilité comme une espèce de tare, et surtout d’abord comme un frein au travail que nous voulons, absolument, abattre. Tout cela est d’ailleurs bien ficelé : les petit·es soldat·es précaires de l’ESR que nous sommes se définissent en grande partie par leur travail, et ne se reconnaissent plus s’ils et elles ne parviennent plus à travailler.
Le discours que j’ai le plus entendu ces dernières années, c’est : « Cela n’a rien à voir avec toi. Il n’y a pas assez de postes, c’est tout. Ces recrutements ne disent rien sur la qualité des personnes qui ne sont pas retenues, ni sur leur travail »….
Auteur : Gilles Martinet
➥ La suite est à lire sur : universiteouverte.org