« Jusqu’à quand allons-nous dénoncer sans agir ? »

L’ère de l’individu tyran. La fin d’un monde commun (Grasset) pose un constat implacable sur ce que nous sommes collectivement devenus, à force de politiques néolibérales éreintantes et de dénonciations continues et infructueuses. Pour y répondre, son auteur, Éric Sadin, livre un plaidoyer magnifique et quelques clefs pour redevenir agissant.

LR&LP : Quand et de quoi est né ce livre ?

Le pas de côté que j’ai enclenché procède d’abord du fait que, depuis dix ans, j’avais le sentiment d’avoir beaucoup exploré le terrain de l’analyse des technologies numériques sous toutes ses formes : les rouages économiques, les intérêts à l’œuvre, la collusion des politiques et la doxa techno-libérale qui n’a cessé de s’imposer depuis le début des années 2000. Si ce travail n’est jamais clos, la cause me semble aujourd’hui entendue.

En quelques années, tout le monde semble avoir à peu près compris les excès du techno-libéralisme et ses interférences sur nos existences, au point que la dénonciation de l’industrie du numérique est presque devenue un sport global, une nouvelle vulgate.

Il y a cinq ou six ans, « je n’étais pas nombreux » à tenir le discours que beaucoup tiennent aujourd’hui ! Au moment de la sortie de mon livre Surveillance globale en 2009, on me disait que j’étais paranoïaque, mais aujourd’hui ce constat, à propos de tant de dérives, est partagé. Il me fallait donc enclencher un autre moment pour comprendre ce que l’usage, de plus en plus massif et étendu, des technologies numériques, produit sur nos esprits, nos corps, nos relations avec les autres et avec le réel.

Le déclencheur de cette entreprise a été l’observation de nouvelles postures. Celles de mon expérience dans la vie quotidienne, celles des corps dans la rue, ou la lecture de posts sur Facebook ou Twitter au cours desquels les personnes ne cessaient de faire valoir une primauté de…

Auteur: Matthieu Delaunay
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