La Cavalière et les autres

Dans cet entretien réalisé par la revue en ligne Trou Noir, l’écrivaine Nathalie Quintane nous parle de son nouveau livre La Cavalière qui revient sur une affaire survenue dans les années 1970, dans la petite ville de Digne-Les-Bains. Une affaire de mœurs, comme ils disent : « Des partouzes chez la jolie prof de philo du lycée mixte. » en guise de gros titre dans un journal à scandales. Elle, la prof de philo, c’est Nelly Cavallero, passée par le Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception, aujourd’hui décédée, a été radiée de l’Éducation Nationale en 1976 pour « incitation de mineurs à la débauche ». Ce retour à Digne est l’occasion pour Nathalie Quintane et pour Trou Noir de chercher à comprendre ce que les soubresauts sexuels et politiques des années 1970 ont encore à nous raconter. Les écarts de générations, de slogans, de lois, d’attitudes et de langages sont au cœur de La Cavalière.

Pour commencer, peux-tu expliquer l’affaire qui concerne Nelly Cavallero, l’objet de l’accusation et la façon dont la presse s’en est ressaisie à l’époque ? Il y a eu plusieurs procès. Ce qui s’est passé c’est tout un ensemble très représentatif de l’époque. Elle militait au MLAC. Elle avait acheté un local en plein centre-ville qu’elle ne fermait jamais. Tous ceux qui voulaient y passer, pouvaient y passer. En particulier les jeunes gens. Majeurs ou mineurs. Et l’une des personnes qui l’avaient aidée à retaper ce local, c’était, comme on dit, un « homosexuel notoire » qui avait déjà été accusé quelques années auparavant de détournement de mineurs. La majorité sexuelle pour les relations homosexuelles était à 21 ans. En plus, elle était prof de philo au lycée et elle a été accusée d’avoir fait étudier un poème d’Antonin Artaud à ses élèves, un poème qui se terminait par ce vers : « Dans le con d’une boniche morte. » Artaud était au programme mais ça a scandalisé certains parents qui l’ont signalé au proviseur. Et puis elle s’est baignée avec des jeunes, à poil dans un torrent, ça s’est su… Bref, c’est multifactoriel, quoi ! Il y avait aussi, et ça je l’ai compris au bout d’un moment, un procureur dans la ville qui était farouchement contre la libération de l’avortement et qui ne voulait certainement pas qu’une femme comme ça qui disait vraiment tout haut ce qu’elle pensait et faisait ce qu’elle disait reste dans la ville de D., surtout en pleine période de campagne…

La suite est à lire sur: lundi.am
Auteur: lundimatin