La chute des mondes

Nous continuons, à tâtons, notre suivi du fascisme qui vient. L’affaire Tesson, dans le cadre du Printemps des Poètes, avait remué le monde littéraire. Mais nous n’étions passés qu’en survol au-dessus de Tesson. Grâce au livre de François Krug, Réactions françaises, on peut essayer de poser quelques éléments d’analyse au service de notre voyage en « pays réel ». L’une des hypothèses qui apparaît ici : notre époque est régie par une logique non pas historique, mais spatiale, une logique non pas dialectique, mais remplaciste – dans la dialectique le même et l’autre peuvent se réconcilier ; dans le remplacisme, un corps ne prend la place d’un corps qu’en l’éliminant. Pas d’hybridation, pas de dépassement, pas de synthèse, pas d’alliance.

Notre camp n’a pas de grands récits. Mais, il faut le reconnaître : l’adversaire non plus. Tout l’antagonisme semble posé narrativement autre part que dans l’Histoire.

Ou plutôt, leur camp a un grand récit. Un grand récit d’angoisse. Un grand récit d’angoisse raciale. Mais c’est un grand récit qui n’appartient pas à l’Histoire. Où il ne s’agit pas de temps. Un grand récit où, justement, il s’agit d’espace et de démographie. D’espaces qui se raréfient. De multiplicités qui pullulent. L’espace devient dangereusement étroit. La multitude d’en face nous submerge. Un récit où il n’y a plus d’espace dans l’espace et où deux corps se substituent mais ne se côtoient pas. Un grand récit de la distance. Le grand récit du remplacement. Mais ce récit, ce récit n’est pas non plus une Histoire. Car nous vivons des temps où il n’y a plus d’Histoire. Nous vivons la fin des temps, qui n’est pas la fin de tout, qui n’est pas la fin du tout, mais les débuts d’une pensée posée à partir de l’espace.

Les îles ne communiquent pas

Ce n’est pas si anodin qu’un écrivain voyageur vienne cristalliser et incarner la…

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Auteur: dev