La civilisation anglaise façonnée par le charbon

Pour endurer les longues et froides nuits d’hiver, quoi de mieux qu’un bon vieux feu de cheminée ? Mais si, au lieu d’opter pour de lourdes souches de bois, vous choisissiez un combustible nettement plus calorique, le charbon ? En tout cas, si vous aviez été Britannique et que vous aviez vécu dans l’entre-deux-guerres, c’est ce que vous aurait rabâché le Coal Utilisation Council, un organe de propagande mis en place par les industriels du charbon avec le soutien de l’État, à grands coups d’affiches hautes en couleur.

C’est dire l’importance du charbon dans la société britannique à l’ère industrielle. Dans une somme sur le sujet, l’historien Charles-François Mathis qualifie cette dernière de « civilisation du charbon ». De fait, la Grande-Bretagne victorienne apparaît comme la première civilisation fossile au monde. Et les problématiques qu’elle a rencontrées, aussi bien sous l’âge d’or du charbon (du milieu du XIXe siècle à la Première Guerre mondiale) qu’au moment de sa sortie (dès l’entre-deux-guerres) permettent de mieux comprendre les caractéristiques des autres « cultures énergétiques » (le nucléaire en France, le pétrole dans les pays du Golfe ou le gaz en Russie).

Précisément, on peut comprendre la structuration économique, sociale, sinon politique, de ces cultures à la lueur de l’énergie dont elles dépendent. En faisant du minerai noir un « miroir du monde » britannique, l’auteur montre à quel point ce combustible agençait l’ensemble de la société, structurant aussi bien la disposition de la maison — toute entière pensée pour le stock du charbon, l’aération des fumées et la répartition optimale de la chaleur à travers les pièces — que des territoires, organisés en fonction des sites de production, des voies de transport et des réseaux de distribution, et déterminant jusqu’à la « sociabilité du feu » autour de la cheminée familiale.

Mine de charbon en Grande-Bretagne, en 1942. Wikimedia Commons/CC0/Ministry of Information Photo Division Photographer

La « sociabilité du feu »

En tant que « point focal de la société britannique », le charbon offre un prisme singulier pour analyser les rapports de force en son sein. Ainsi, l’inégalité de l’accès à cette ressource met en lumière la lutte des classes alors en vigueur dans cette société industrielle pionnière. Certes, les charbonniers vantaient le plaisir des « coal feelings » auprès du feu de cheminée, partagés par l’ensemble des classes sociales,…

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Auteur: Reporterre