« La Coupe du monde révèle l’esclavagisme moderne toujours en cours dans le monde »

Dans cette tribune, nous donnons la parole à Marie-Laure Guislain. Ancienne responsable du contentieux stratégique à Sherpa, autrice des plaintes contre Vinci, de la conférence gesticulée et du livre, « Le néolibéralisme va-t-il mourir et comment faire pour que ça aille plus vite ? ou désenvoutement », elle a mené l’enquête sur les chantiers de la coupe du monde au Qatar pour réunir les preuves nécessaires au dépôt de plainte contre Vinci pour travail forcé et réduction en servitude. Elle analyse ici de manière plus globale le système d’esclavage moderne, dont la Coupe n’est que la partie émergée de l’iceberg. Elle rappelle la part de responsabilité des multinationales dans ce système et propose des pistes pour y mettre fin.

Au cours de mon enquête au Qatar en 2014, sur les chantiers de la Coupe du Monde, j’ai été confrontée à la violence du système global d’esclavage moderne. Certaines preuves ont été versées dans une plainte rédigée contre Vinci, dans le cadre de mon poste de responsable du contentieux stratégique à Sherpa. Huit ans après, le 10 novembre 2022, à quelques jours du lancement de la coupe, la société est mise en examen pour réduction en servitude et travail forcé.  

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Cachés dans des endroits isolés pour ne pas être renvoyés, les ouvriers des chantiers de diverses entreprises me témoignaient : 40° en plein soleil ; 11h par jour ; parfois 7 jours sur 7 ; des lits superposés en grande promiscuité – pourtant proscrits par les normes qataries – ; lever à 4h30 ; 3 h de transport par jour depuis les camps de logement isolés dans le désert ; un salaire de misère.  

Résultat ? Un cimetière à ciel ouvert. Au moins 6500 ouvriers sont morts sur les chantiers de la Coupe de 2011 à 2020, en majorité de crise cardiaque, alors âgés pour la plupart entre 20 et 40 ans.

Les ouvriers interrogés craignaient de « tomber comme leurs collègues » et ne plus se relever. Les ambassades se plaignaient de devenir des pompes funèbres. Les multinationales qui les embauchaient, elles, ont préféré ignorer le problème en qualifiant ces accidents de travail de « morts naturelles » pour ne pas devoir indemniser les familles. Point d’autopsie pour ces esclaves oubliés, ni de récits des morts survenues après les retours aux pays.

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Auteur: La Relève et La Peste