La demande de la Chine pour les ânes d’Afrique augmente : pourquoi il faut contrôler ce commerce

Ces dernières années, la demande de peaux d’ânes a augmenté de façon considérable en Chine, où elles sont utilisées pour fabriquer un ancien produit de santé appelé ejiao. L’Ejiao est fabriqué à partir de collagène extrait de peaux d’âne mélangé à des herbes et à d’autres ingrédients pour créer des produits médicinaux et de santé. On lui prête des propriétés qui renforcent le sang, arrêtent les saignements et améliorent la qualité des fluides vitaux et du sommeil.

L’Ejiao coûte environ 783 dollars US par kilo et le marché chinois de ce produit est passé d’environ 3,2 milliards de dollars US en 2013 à environ 7,8 milliards de dollars US en 2020. Cette récente hausse de la demande est due à plusieurs facteurs, notamment l’augmentation des revenus, la popularisation du produit par une série télévisée et le vieillissement de la population (l’âge est un facteur démographique clé de la demande). En outre, l’ejiao est parfois prescrit par des médecins et son coût peut désormais être couvert par l’assurance maladie.

Ejiao.
HelloRF Zcool/Shutterstock

La demande d’ejiao a entraîné une pénurie d’ânes en Chine et de plus en plus dans le monde. Les pays d’Afrique ont été particulièrement touchés.

L’Afrique abrite le plus grand nombre d’ânes au monde : environ deux tiers de la population mondiale estimée à 53 millions d’ânes en 2020. Il n’existe pas de chiffres exacts sur le nombre de peaux exportées vers la Chine en raison de l’augmentation du commerce illicite, mais il existe des indications. Une étude de la population d’ânes d’Afrique du Sud, par exemple, suggère qu’elle est passée de 210 000 en 1996 à environ 146 000 en 2019. Ce phénomène a été attribué à l’exportation de peaux d’ânes.

Dans un article récent, j’ai examiné les tendances, les problèmes et les perspectives du commerce des ânes entre l’Afrique et la Chine. Mes informations proviennent d’entretiens, de la littérature et de revues de presse en anglais et en chinois.

Mes conclusions sont que l’ampleur du commerce des ânes, tant illicite que légal, constitue un défi pour de nombreux pays d’Afrique, notamment en termes d’impact sur les communautés les plus marginalisées. Outre le bien-être de l’âne, une grande partie du problème est de savoir si les ânes sont abordables localement. Les ânes ont un rôle précieux et ancien de cheval comme trait et le fait de ne plus y avoir accès crée un énorme problème pour les ménages pauvres. L’autre partie du défi est d’ordre réglementaire. Ce n’est que lorsque le commerce des peaux d’ânes sera entièrement réglementé – et que les chiffres d’exportation pourront être très limités – que ce commerce pourra fonctionner sans conséquences négatives pour les pauvres.

C’est ce qu’a également souligné une enquête récente de la Communauté d’Afrique de l’Est, qui a constaté que la région n’était pas prête pour l’abattage massif et le commerce non réglementé des ânes. Des millions de personnes vulnérables en Afrique de l’Est dépendent des ânes pour vivre et risquent d’être lésées par le commerce de la peau d’âne.

Importance des ânes

On estime que l’âne fait vivre environ 158 millions de personnes en Afrique. Dans les zones rurales, la présence d’un âne dans un foyer contribue à atténuer la pauvreté et libère les femmes et les filles des corvées ménagères.

L’âne est l’un des moyens les plus simples, les plus durables et les plus abordables pour transporter les personnes, les marchandises et les intrants et extrants agricoles de la maison à la ferme au marché et vice versa, ainsi que vers les puits d’eau et autres endroits. Même dans des environnements difficiles, les ânes peuvent parcourir de longues distances avec une charge lourde, des fluides limités et sans montrer de signes de fatigue. Ils constituent un atout durable pour les ménages.

La possession d’un âne augmente la productivité et diminue le travail pénible, par exemple en réduisant les charges que les femmes doivent autrement porter elles-mêmes. Au Ghana, par exemple, on a constaté que la possession d’un âne permettait aux adultes d’économiser environ cinq heures de travail par semaine et aux enfants dix heures par semaine. La présence d’un âne permettait également aux filles d’aller à l’école.

Les ânes peuvent…

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Auteur: Lauren Johnston, Senior Researcher, South African Institute of International Affairs