La quête d’une cybersécurité résistante à l’arsenal quantique

Treize, 53, 433… la taille des ordinateurs quantiques est donnée en termes de bits quantiques, ou « qubits ». Elle a augmenté considérablement ces dernières années grâce à d’importants investissements publics et privés. Clairement, il ne faut pas se focaliser seulement sur leur quantité, car la qualité des qubits que l’on arrive à préparer est aussi importante que leur nombre pour qu’un ordinateur quantique surpasse un jour nos ordinateurs classiques actuels – on parle d’atteindre « l’avantage quantique ». Pourtant, il est concevable que des dispositifs de calcul quantique offrant un tel avantage soient disponibles dans un avenir proche. Comment cela affecterait-il notre vie quotidienne ?

Il n’est jamais facile de faire des prédictions, mais il est admis que la cryptographie sera modifiée par l’avènement des ordinateurs quantiques. Il est devenu banal de dire que la protection de la vie privée est une question essentielle dans notre société de l’information : chaque jour, de grandes quantités de données confidentielles sont échangées, par exemple via l’internet. La sécurité de ces transactions est cruciale et dépend principalement d’un seul concept : la complexité, ou plus précisément la complexité informatique. Les informations confidentielles restent secrètes parce que tout ennemi ou espion désireux de les lire doit résoudre un problème mathématique extrêmement complexe.

[Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. Abonnez-vous aujourd’hui]

En fait, les problèmes utilisés pour la cryptographie sont si complexes pour nos algorithmes et ordinateurs actuels que l’échange d’informations reste sûr en pratique, car résoudre le problème puis pirater le protocole prendrait un temps ridiculement long (des années, voir plusieurs milliers d’années, par exemple).

L’exemple le plus emblématique de cette approche est le protocole RSA (pour ses inventeurs Ron Rivest, Adi Shamir et Leonard Adleman), le schéma utilisé de nos jours pour sécuriser nos transmissions d’informations (par exemple les transactions bancaires). Sa sécurité repose sur le fait que nous ne connaissons pas d’algorithme efficace pour factoriser les grands nombres. Alors que la factorisation est un problème mathématique facile, que beaucoup d’entre nous ont déjà rencontré à l’école (étant donné un grand nombre, le but est de trouver deux nombres dont le produit est égal au nombre initial, en laissant de côté la solution triviale donnée par le nombre initial et un – par exemple, si le nombre initial est 6, la solution est 2 et 3, car 6=2×3), les protocoles cryptographiques sont construits de telle manière que l’ennemi, pour décrypter le message, doit factoriser un très grand nombre (pas 6 !), ce qui est actuellement impossible en pratique.

Mais si l’on construit des dispositifs informatiques plus puissants, pour lesquels les problèmes mathématiques utilisés actuellement pour la cryptographie sont faciles à résoudre, notre paradigme actuel en matière de protection de la vie privée doit être repensé. En d’autres termes, tandis que les ordinateurs classiques peuvent avoir besoin de durées folles pour résoudre les versions les plus ardues d’un problème (l’âge de l’univers par exemple), les ordinateurs quantiques idéaux devraient être capables de le faire en quelques minutes… ou, si l’on considère des modèles plus réalistes d’ordinateurs quantiques, peut-être en quelques heures.

C’est pourquoi les cryptographes développent des solutions pour remplacer RSA et atteindre la « sécurité quantique », c’est-à-dire des protocoles cryptographiques qui sont sûrs contre un ennemi qui a accès à un ordinateur quantique. Pour ce faire, il existe deux approches principales : la cryptographie post-quantique et la distribution de clés quantiques.

Comment crypter des informations dans un monde équipé d’ordinateurs quantiques ?

La cryptographie post-quantique maintient le paradigme de sécurité basé sur la complexité : on cherche les problèmes mathématiques qui restent difficiles même pour les ordinateurs quantiques, et on les utilise pour construire des protocoles cryptographiques. L’idée est toujours qu’un ennemi a besoin d’un temps ridiculement long pour pirater le protocole. Les chercheurs…

La suite est à lire sur: theconversation.com
Auteur: Antonio Acín, Professor and group leader, Instituto de Ciencias Fotónicas (ICFO)