La représentation est morte

« Il faut bien un code pour comprendre ce qui se passe. Et le code est la réduction de la communication. Il n’est plus possible de parler en termes d’antipathie ou de sympathie ; les êtres sont des particules neutres d’enregistrement d’information et de renvoi d’information ». Ainsi se révélait, pour Jacques Camatte (Errance de l’humanité) un certain aspect de « la communauté (matérialisée du) capital en laquelle l’État est toujours plus immergé ».

A ce degré de dépossession totale de l’homme, de mort sociale et de mort politique, « existant ‘jeté’ dans la communauté capital et mis en mouvement par le devenir de celui-ci », on ne s’étonnera pas aujourd’hui qu’au second tour des élections régionales en France, l’abstention maintienne un taux record de près de 70% . Chaque élection, à vrai dire, marque désormais un taux record d’abstention, que la suivante dépasse.

Les raisons classiques invoquées, qui provoquent le semblant de panique des observateurs de tous poils, politologues et médiacrates, sont non seulement caduques mais sources d’enfumage trahissant l’aversion à peine dissimulée contre ces citoyens qui refusent d’accomplir leur devoir. Être ou ne pas être partisan de l’abstention est un débat lui-même éculé, tant il ne s’agit plus en effet d’antipathie ou de sympathie pour le processus électoral. La désaffection de la clientèle électorale (plus que du clientélisme) pourrait bien inscrire ce verdict définitif : qu’ils arrêtent de nous emmerder, et commencent par bien faire leur boulot, pour le reste : la politique on s’en fout, elle n’a plus aucun sens pour nous.

Mais comment peut-on encore espérer la pure et simple nomination de mandatés qui feraient bien leur boulot, si on ne les élit plus ? Secrètement peut-être, bien que de plus en plus clairement formulé lorsqu’on aborde dans les conversations « la crise de la représentation », on réclame la venue d’un gouvernement technique. L’Italie a donné la première l’exemple (comme bien souvent) depuis 2011 avec le gouvernement d’experts de Mario Monti, et encore en ce moment avec celui de Mario Draghi. Enfin on serait soulagé du devoir de choisir, et alors chacun son boulot. L’évaluation au jour le jour, comme dans les entreprises managées, fera le reste.

En France, pays de la représentation sacrée, la solution semble impensable, et n’est d’ailleurs pas à l’ordre du jour en termes partisans, malgré les quelques appels du pied infructueux de la hyène…

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Auteur: lundimatin