La stratégie 'zéro Covid' bousculée par les variants du virus

Samuel Alizon est directeur de recherche CNRS/IRD. Écologue et évolutionniste, il est spécialisé dans l’étude et la modélisation des maladies infectieuses. Il est l’auteur d’Évolution, écologie, pandémies, faire dialoguer Pasteur et Darwin, Point Sciences, 2020.


Nous nous étions rencontrés en début d’année pour parler de l’évolution du Sars-CoV-2, ce virus dont nous sommes l’environnement. Quels événements ont marqué cette évolution depuis lors ?

Samuel Alizon — L’apparition du variant Delta — classé VOC (« variant préoccupant ») par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en mai 2021 — a probablement été l’événement le plus important. On s’attendait à l’apparition de variants plus contagieux : c’est l’évolution logique de ces « machines à se reproduire » que sont les virus. Lorsqu’une mutation (ou un assemblage de mutations) augmente la transmissibilité, elle se répand peu à peu, et c’est ce qu’on avait observé avec les variants Alpha et Bêta. Mais le variant Delta était si transmissible, sous l’effet combiné de ses différentes mutations, qu’il était presque qualitativement différent : avec lui, nous sommes entrés dans une certaine mesure dans une autre pandémie. Son R0, par exemple, se situe entre 6 et 8, c’est-à-dire qu’une personne en infecte en moyenne entre 6 et 8 autres dans une population non vaccinée. C’est plus du double de la valeur des souches précédentes. Seuls trois virus respiratoires sont aussi contagieux, les oreillons, la varicelle et la rougeole, alors que pour la grippe annuelle, le R0 n’est que de 1,5.

Une des conséquences de cette transmissibilité spectaculaire du variant Delta, qui a remplacé pratiquement toutes les souches antérieures en quelques semaines, est que la stratégie dite « zéro Covid » devient probablement irréaliste sur le long terme. Supprimer la circulation du virus par des confinements rapides et les plus localisés possible, le tout combiné avec un traçage efficace des contacts, était envisageable à l’été 2020 — même si cela posait de nombreux problèmes. Désormais cela semble illusoire.

« Chaque augmentation de la contagiosité du virus s’est accompagnée d’une augmentation de sa virulence »



Un autre événement important est l’apparition du variant Omicron, qualifié de « variant préoccupant » en novembre 2021. Mais ses conséquences sont plus incertaines. Comment a évolué la virulence du Sars-CoV-2 ?

Pour l’instant, chaque augmentation de la…

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Auteur: Reporterre