L’abstention : un signe de défiance, plus que d’indifférence

Plus de 45 millions d’électeurs et d’électrices sont appelées aux urnes. Pourtant, selon les prévisions, moins de 40 % d’entre eux pourraient participer aux élections régionales et départementales. Les 20 millions d’abstentionnistes annoncés consacre à nouveau le « parti de l’abstention », « premier parti de France ». derrière la formule simpliste, un mouvement de fond érigeant définitivement la France en «démocratie de l’abstention» (déjà décrite par Céline Braconnier et Jean-Yves Dormagen). Comment l’expliquer ? Certes, non seulement ce scrutin est traditionnellement peu mobilisateur, mais l’attention actuelle de nos concitoyens sur les conséquences économiques et sociales de la pandémie ou pour des thématiques comme l’insécurité et le pouvoir d’achat dépassent largement les seules compétences des régions. Reste que les sources d’explication de cette tendance abstentionniste sont plus profondes et la solution d’une meilleure participation électorale ne saurait se résumer à la reconnaissance du vote blanc ou à la simplification des procédures d’inscription sur les listes électorales.

 

Le vote demeure en droit français un acte volontaire et donc juridiquement facultatif (en conséquence, l’inscription sur les listes électorales n’est pas automatique, à l’exception des jeunes atteignant l’âge de 18 ans). Il n’empêche, il ne s’agit pas d’un acte individuel, d’un moyen d’expression, d’un droit politique comme les autres. C’est un signe fort de socialisation et de politisation du citoyen par lequel il se saisit et décide des affaires publiques. Si la citoyenneté établit le lien social entre l’individu et le corps politique, c’est au moment de l’élection que les Français(es) se constituent de manière ponctuelle et symbolique en «communauté de citoyens». C’est pourquoi le vote représente un devoir dans la morale civique et républicaine.

Ce discours civique pèse peu aujourd’hui. Si le phénomène abstentionniste donne lieu à des interprétations diverses et contradictoires (acte passif ou actif, voire militant), il témoigne d’une double fracture politique et sociale qui (dé)structure la société française.

D’une part, de nombreux scrutins confirment une moindre participation électorale des catégories sociales les moins favorisées ou faiblement diplômées. Si l’abstention est traditionnellement analysée comme une pathologie du fonctionnement du système représentatif, sa compréhension ne saurait se…

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Auteur: Nabli Béligh