L'affaire Quatennens et les hypocrisies du journalisme politique

Dans l’après-midi du 13 septembre 2022, Le Canard Enchainé fait une publicité pour son édition du lendemain, révélant que Céline Quatennens a déposé une main courante contre son époux Adrien Quatennens. Ces derniers confirment l’information par voie de communiqué quelques heures plus tard, rappelant que Céline Quatennens avait exigé auprès des policiers que « les informations ne se retrouvent pas dans la presse ». Des faits de violence conjugale sont dévoilés le lendemain par Le Canard, confirmés ensuite par Adrien Quatennens, et occupent le devant de la scène médiatique pendant plus d’une semaine. Un traitement qui, dans de nombreux cas analogues, n’a pas relevé d’actes de féminisme journalistique.

Disons-le d’emblée : le fait que les violences sexistes et sexuelles occupent désormais régulièrement le haut de l’agenda marque une rupture majeure, du point de vue de l’information, avec le traitement médiatique qui accompagnait ces sujets jusqu’aux mouvements Balance Ton Porc et MeToo. Un traitement qui contribuait structurellement à reproduire et renforcer les inégalités de genre et participait de la « culture du viol », y compris dans les cas d’omerta à l’échelle de masse : rappelons à cet égard qu’à ce jour, l’association « MeToo médias » confie avoir recueilli le témoignage de 90 femmes contre Patrick Poivre d’Arvor, tandis qu’au 30 septembre 2022, Le Parisien dénombrait à 21 le nombre de plaintes déposées contre l’ancien présentateur du « 20h », « dont neuf pour viol ».

D’un point de vue « qualitatif », et malgré la persistance de nombreux travers, des progrès notables ont eu lieu dans les rédactions, notamment du point de vue de la formation des journalistes, dont les « récits » sur ces questions n’ont que peu à voir avec ceux que l’on croisait systématiquement il y a encore cinq ans. Toutefois, lorsque les affaires de violences touchent le champ politique, la couverture d’une partie des médias peut faire les frais du journalisme politique et de ses travers structurels : un journalisme ravagé par les partis pris, ruiné par le sensationnalisme et la course à la petite phrase. Les cas de violences en viennent aussi à être pris en charge par des têtes d’affiche commentant d’ordinaire « l’actualité politique » sans avoir nullement peaufiné leur formation sur ces questions – pour peu que cette dernière ait un jour commencé.

Il n’est donc pas étonnant que le traitement médiatique des violences conjugales…

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Auteur: Mathias Reymond, Pauline Perrenot Acrimed