L’agriculture numérique sauvera-t-elle le monde ?

Alors que la crise écologique fait rage et que des inquiétudes percent quant à la capacité des sociétés humaines à nourrir une population croissante, le capitalisme possède comme toujours la solution pour sauver l’humanité : l’agriculture numérique. Nouvel éden pour de nombreuses entreprises ayant développé des technologies de pointe, le capitalisme agricole espère se sauver, et nous sauver, par l’introduction de ces technologies dans les champs. C’est à une transformation en profondeur des pratiques agricoles et du travail des paysan·nes que contribue ce capitalisme techno-agricole, au service des firmes et start-up en pointe dans le secteur des nouvelles technologies.

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Discours dominant et justification

Aout 2020, Cédric O alors secrétaire d’Etat chargé de la transition numérique et Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture de l’époque, annoncent débloquer un budget de 200 millions d’euros pour préparer la « French AgriTech ». Derrière cette dénomination pas très inspirée, rien de moins qu’un vaste plan d’accompagnement de start-ups tricolores avec pour but premier l’innovation au service des agriculteurs et de l’écologie. Devant le petit panel de journalistes réunis ce jour-là, nos élus nous l’assurent, « il faut y aller à fond » pour transformer durablement notre modèle agricole par les nouvelles technologies afin de répondre aux défis du siècle.

Ces récits sous fond d’eschatologie rampante cimentent ainsi la littérature de l’écosystème numérique agricole,  les récents rapports d’organisation comme la FAO ou l’OCDE ne faisant pas exception. Un discours profondément installé, distillé au gré des conférences comme lors de cet évènement d’avril 2021 organisé par la Banque mondiale où « innovateurs technologiques, responsables publics et dirigeants du secteur privé se sont penchés sur le potentiel transformateur du numérique pour relever ce défi : nourrir le monde ». Ainsi, à en croire ces experts, nos sociétés risquent de ne pas assurer la durabilité et la sécurité du système alimentaire si elles n’opèrent pas un basculement complet vers les technologies numériques agricoles. Un basculement numérique, présenté comme nécessaire voire inévitable.[1].

Mais en réalité, lorsque Julien Denormandie nous dit « d’y aller à fond » c’est un peu comme quand Mark Zuckerberg, le célèbre patron du réseau social Facebook, nous dit de « bouger vite et casser des choses ». Une forme « d’accélérationnisme » qui…

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Auteur: redaction