L’amour plus fort que le capital ?

La cause semble entendue : l’amour aurait été annexé par le capitalisme, avalé par les publicités de la Saint-Valentin, digéré par les téléfilms de Noël, uberisé par Tinder. De nos quêtes amoureuses, ils ne resteraient que des morceaux épargnés par le système mais qui seraient de toute façon bousillés par le patriarcat et quelques souvenirs de lycée, devenus depuis des « relations » Linkedin et des gens que l’on envie sur Instagram. Pour les gens critiques de la société de classe et patriarcale dans laquelle on vit, se réclamer de l’amour, voire en parler, n’a pas bonne presse. Au mieux expression de sa niaiserie face à la cruauté du monde, à peine à la hauteur d’un discours de Hugh Grant dans Love Actually, au pire signe de son conservatisme petit bourgeois, qui plus est nostalgique des femmes soumises et du confort individualiste. Dans cet article, je tente de soutenir l’idée inverse : et si nos sentiments à l’égard des autres – j’y inclue l’amour, l’amitié, la camaraderie – constituaient en fait les plus gros cailloux dans la chaussure des promoteurs du capitalisme total ? Et si le petit battement de cœur que nous ressentons à l’égard d’autrui – désir, tendresse, affection, estime, attachement … – était la seule chose qui nous empêchait de devenir les individus rationnels, égoïstes et intéressés que les théoriciens du libéralisme ont imaginés ? Bref, l’amour ne serait-il pas, par essence, anticapitaliste ?


Quand j’enseignais la sociologie, je m’amusais toujours, lors de mon cours sur les classes sociales, à projeter une image tirée du film « Titanic » en disant qu’il s’agissait-là d’un scenario hautement improbable d’un point de vue sociologique. 3e plus gros succès du box-office mondial, le film de James Cameron raconte l’histoire d’amour entre une jeune femme de l’aristocratie britannique et un jeune homme désargenté et vagabond (mais propre sur lui), sur fond de naufrage d’un paquebot, dans une société de classe terriblement ségrégée. Leur amour qui naît comme un coup de foudre vient bouleverser les frontières de classe, emportant l’un dans l’univers de l’autre et vice-versa. 

La passion ne survit toutefois pas au naufrage qui, conformément à la réalité historique, voit la quasi-intégralité des passagers prolétaires mourir dans l’eau glacée de l’Atlantique Nord tandis que la majorité des bourgeois et aristocrates sont sauvés. Cynique que j’étais, je racontais que ce n’était pas plus…

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Auteur: Rédaction Frustration Mag