Le bruit des bots et l’avenir du scroll-talk.

Cet article a initialement été rédigé durant le mois d’Août 2023. Il a donné suite à une version (très très très) courte, centrée sur la toute fin de mon argumentaire, autour d’un web “synthétique”, version publiée dans Le Monde du 7 Octobre et republiée ici pour archivage quelques jours plus tard dans une version légèrement augmentée.

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Depuis quelques années on appelle cela le “small talk”, une petite conversation polie ou l’on parle de tout mais surtout de rien. Je veux ici vous parler du “scroll talk” et d’un avenir dans lequel, possiblement, des agents conversationnels (talk) seraient nos principaux prescripteurs de navigation (scroll).

Mais revenons d’abord au “small talk”, à ses dérivés et déclinaisons et à leur prégnance dans nos univers sociaux numériques.

La philosophe Gloria Origgi avait, il y a plus de 10 ans, formé le terme de “kakonomie”, permettant de désigner “l’étrange mais très largement partagée préférence pour des échanges médiocres tant que personne ne trouve à s’en plaindre. (…) La kakonomie est régulée par une norme sociale tacite visant à brader la qualité, une acceptation mutuelle pour un résultat médiocre satisfaisant les deux parties, aussi longtemps qu’elles continuent d’affirmer publiquement que leurs échanges revêtent en fait une forte valeur ajoutée.

Le sociologue Erving Goffman, à la fin des années 1950, parlait de son côté de “rituels” et “d’activités cérémonielles” où l’on joue à être ce que l’on est ou à s’aligner sur la représentation de soi que l’on pense attendue par les autres, à l’image du garçon de café de Sartre.

Il est assez facile de voir à quel point le concept de kakonomie ou la part de l’oeuvre de Goffman consacrée aux interactions sociales sont fécondes pour analyser ce qui se joue dans nos…

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Auteur: Olivier Ertzscheid