Le chien descend-il vraiment du loup ?

Confortablement assis sur votre canapé, vous regardez votre chien dormant paisiblement auprès de vous. Est-il en train de rêver de son dernier bol de croquettes ? Ou s’imagine-t-il peut-être la grande saga odysséenne de ses ancêtres, parcourant en meute les vastes steppes du dernier « Âge de Glace » à la poursuite des rennes qui constitueraient leur prochain repas ?

L’histoire des liens ancestraux entre le chien (le premier animal à avoir été domestiqué) et le loup est l’une des aventures évolutionnaires les plus passionnantes de l’histoire humaine. Non seulement nous interroge-t-elle sur la relation que nous avons au reste de la nature, mais elle nous renvoie aussi, par extension, à la question de tout ce que nous sommes en tant qu’être humain.

Les dernières avancées en génétique commencent à livrer des détails clés qui nous permettent d’esquisser l’histoire connexe de nos fidèles compagnons de maison, et de ces fiers canidés sauvages qui repeuplent peu à peu nos campagnes.

A l’origine fut le loup

Aujourd’hui, le chien (Canis familiaris) est le carnivore le plus répandu sur la planète. Il fait partie de notre aventure humaine depuis le temps où nous étions encore des chasseurs-cueilleurs nomades, 20 000 ou même 30 000 ans avant l’invention de l’agriculture.

On recense près de 350 races de chien officielles dans le monde et ils sont aujourd’hui près de 7 millions dans les foyers français. Si sa fidèle présence à nos côtés est depuis longtemps considérée comme allant de soi, le chien est pourtant un élément relativement récent de l’évolution humaine. Mais l’histoire et la chronologie de la domestication du chien se révèlent très complexes et alimentent tout autant les débats scientifiques, que mythes ou autres croyances au sein de nos sociétés. À la question : « de quel animal le chien descend-il ? » la plupart des adultes comme des enfants répondront sans hésiter : « le loup, bien sûr ! » Oui mais voilà, de quel loup parle-t-on ici ?

Le loup gris (Canis lupus) est un superprédateur présent dans tout l’hémisphère nord. En d’autres termes, le loup est une espèce qui se situe en haut de la chaîne alimentaire, qui n’a pas vraiment de prédateurs naturels, et qui régule l’équilibre de son écosystème par la prédation. Son origine est nébuleuse mais assurément très ancienne, et remonte probablement à quelque 800 000 ans. Les lupidés sont génétiquement très diversifiés, et environ quarante sous-espèces actuelles ont déjà été décrites.

Meute de loups gris.
Maxime Marrimpoey

Malgré les restrictions d’habitat et de niche écologique engendrées par les êtres humains depuis la Préhistoire, les loups sont parmi les seuls des grands carnivores à avoir survécu l’extinction de masse de la fin du Pléistocène (il y a entre 50 000 et 10 000 ans), et ce notamment grâce à leur grande résilience écologique et à la flexibilité de leurs comportements prédateurs. Au cours de ces deux derniers siècles, les pressions indirectes liées à l’urbanisation ainsi que les nombreuses campagnes d’exterminations ont mené à une disparation quasi complète de ses formes sauvages en Europe. Mais depuis quelques années, sa présence se rétablit lentement grâce à des programmes de conservation. Le loup gris est actuellement réintroduit dans nos contrées européennes aux côtés de 3 autres espèces de carnivores : l’ours brun, le lynx boréal et le glouton.

Entre chien et loup

La chronologie de la domestication du loup préhistorique est probablement l’un des débats les plus animés des sciences de l’évolution. Si la paléontologie apporte évidemment des composantes importantes à ce débat, les analyses ostéo-morphologiques (l’étude de la taille et de la morphologie des os) qui sont en mesure de discriminer les proto-chiens restent difficiles à identifier.

Depuis les travaux de Charles Darwin, nous savons qu’une série de changements phénotypiques (caractéristiques physiques observables) sont observés sur les animaux qui subissent un processus de domestication, du moins après de nombreuses générations de traits scrupuleusement sélectionnés (souvent favorisant les individus les plus dociles). Au fil des millénaires, les canidés domestiqués ont par exemple vu…

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Auteur: Elodie-Laure Jimenez, Chercheure en archéologie préhistorique et paléoécologie, University of Aberdeen