Le cinéma du Média #3. Vie et mort d’un sourire

Todd Phillips fut longtemps un réalisateur de comédies. Plusieurs succès à son actif, au moment – milieu des années 2000 environ – où le genre se réinvente autour et au-delà de Judd Apatow. Old School, Starsky & Hutch puis, surtout, la série des Very Bad Trip. Mais en 2019, changement de cap. Phillips signe un film dont la comédie n’est plus le genre mais le sujet. Fini de rire, ou presque. Fini de rire car on a trop ri, tellement ri qu’on ne sait plus à quoi bon on pourrait rire encore. C’est le premier Joker. L’aspirant comique Arthur Fleck se transforme en plaisantin de la mort baptisé le Joker. Il devient ainsi à la fois tueur, coqueluche des médias et étendard de la colère populaire.

Joker s’achève, on s’en souvient, dans un climat de guerre civile assez conforme aux craintes agitées par Bruno Retailleau lors de son entrée en fonction. Lion d’Or à Venise et carton monumental. De nombreuses luttes sociales adoptent même le personnage pour référence. Nous sommes cinq ans plus tard. Aujourd’hui sort la suite, avec son drôle de titre français et la présence, aux côtés de Joaquin Phoenix en Joker, de Lady Gaga dans le rôle d’Harley Quinn.

Joker avait beau être un film à la limite du regardable – enflé, grandiloquent, moche, glauque à en décéder –, il s’appuyait sur un constat d’une indubitable pertinence historique. L’omniprésence du comique a succédé à sa rareté. Il appartenait au registre de la subversion. Il n’y appartient plus : on l’a transformé en une valeur positive comparable au sport ou à une alimentation saine. Comment, dans ces conditions, réactiver sa force ? Comment tuer le smile ? Il n’est pas étonnant que la question ait paru tout sauf oiseuse à un cinéaste ayant le pédigrée de Phillips. Réponse : en faisant de la comédie non une santé mais une pathologie – les crises de rire d’Arthur – et en plaçant la figure du clown en contiguïté avec celle du…

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Auteur: Le Média