Le contrôle du corps des femmes, un enjeu fondamental pour la République islamique d’Iran

Comme cette passante photographiée à Téhéran en mars 2022, les femmes iraniennes semblent en permanence se trouver sous la surveillance du guide de la Révolution, Ali Khamenei.

En Iran, la « question des femmes » fait aujourd’hui les gros titres des journaux du monde entier, en raison de la révolte en cours depuis plusieurs semaines, violemment réprimée par un régime aux abois. Cette « question » n’est pas nouvelle ; en réalité, elle a régulièrement été un terrain de contestation politique et culturelle depuis des décennies.

L’ancien régime de la dynastie Pahlavi (1925-1979) en avait fait son cheval de bataille et le symbole de la modernisation du pays. À rebours, le régime actuel en a fait le pilier de son authenticité, de son rejet du système précédent et de sa lutte contre l’impérialisme et l’occidentalisation.

Avant 1979, ces intellectuels qui dénonçaient les droits des femmes

Bien avant la révolution de 1979, le sociologue et militant politique Ali Shariati (1933-1977), parfois considéré comme l’idéologue de la révolution iranienne, encourageait la participation politique et sociale des femmes en leur suggérant de s’inspirer des combattantes algériennes ou palestiniennes, en première ligne dans les luttes d’indépendance de leurs patries respectives, et non des femmes des classes moyennes qu’il stigmatisait comme hich o poutch (insignifiantes), oisives et obsédées par le sexe.

En outre, il mobilisait des images de femmes connues du chiisme, surtout celle de Fatima, fille du prophète et épouse d’Ali (premier imam des chiites) qui, aujourd’hui encore, est promue comme le modèle idéal de la femme, mère et épouse, et célébrée durant la Journée des mères qui a remplacé celle du 8 mars.

Un autre auteur avait également préparé le terrain. Dans son livre Occidentosis (Gharbzadegui), publié en 1962, Jalal Al-e-Ahmad (1923-1969) dénonçait la « dégénérescence » de la culture iranienne due à la modernité, interprétée comme un processus essentiellement impérialiste et toxique. Cette occidentosis était selon lui une maladie dont la femme portait le virus et contre laquelle il fallait protéger la population.

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Dès l’instauration de la République islamique, en 1979, le voile (hedjab) assure ce rôle de protection. Selon les nouveaux maîtres du pays, il prémunit aussi bien l’homme que la femme, et immunise toute la population. Ce voile que les modernistes considéraient comme un symbole de sous-développement culturel est érigé comme signe d’émancipation vis-à-vis du modèle « occidental » imposé par le régime précédent. Reza Shah Pahlavi (au pouvoir de 1925 à 1941)…

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Auteur: Firouzeh Nahavandi, Professeure émérite, Université Libre de Bruxelles (ULB)