Le cran des Tunisiennes

Petit pays, à l’honneur au dernier festival du film de La Rochelle (FEMA), la Tunisie compte en revanche un nombre important de cinéastes, notamment des femmes, auxquelles le FEMA a rendu hommage cette année. Le départ forcé du tout-puissant Zine el-Abidine Ben Ali (2011) a provoqué « une explosion culturelle, une forte envie de parler de tout, après tant d’années d’oppression », selon Henda Haouala, maîtresse de conférences à l’Université de Tunis. Une oppression qui prenait le nom de censure côté cinéma, et qui sous Habib Bourguiba et Zine el Abidine Ben Ali voyaient des films être coupés et d’autres interdits. C’est dire si les pionnières Salma Baccar (Fatma 75, 1976) et Nejia Ben Mabrouk (La Trace, 1982) d’abord, Moufida Tlatli (Les Silences du Palais, 1994), Kalthoum Bernaz (Keswa, le fils perdu, 1997) et Raja Amari (Satin rouge, 2002) ensuite, ont joué avec les règles pour poser les jalons sur lesquels la génération suivante a bâti. « Le cinéma est un art, une suite logique, une construction qui se fait et doit se faire », estime Salma Baccar, dont le film Fatma 75 (1976), un docu-fiction très novateur resté censuré pendant 40 ans, était forcément politique : sous forme d’un exposé, l’étudiante Fatma y rend hommage aux femmes de l’histoire du pays puis rappelle que la Tunisienne jouit en 1975 (la loi sur le droit à l’avortement date de 1973, deux ans avant la loi Veil) d’une liberté sans égale en Afrique (Code du Statut Personnel, 1956, instaurant plus d’égalité hommes-femmes au lendemain de l’Indépendance). Plus classique, Les Silences du palais (1994) n’en est pas moins féministe — la mort de sa réalisatrice Moufida Tlatli, en 2021, a donné à Sophie Mirouze, responsable du festival, l’idée de ce gros plan sur le cinéma de ce pays. Le film montre une servante redoutant d’exposer sa fille aux abus de l’aristocrate dont elle-même est la maîtresse. Éminemment…

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Auteur: Pascal Corazza