Le féminisme polonais au seuil d’une révolution

Dans cet entretien, publié en français initialement par la revue Inprecor, Kacper Leśniewicz revient avec Magdalena Grabowska et Marta Rawłuszko sur les dynamiques féministes actuelles en Pologne. Alors que le pays est marqué depuis longtemps par une réaction forte, notamment contre les droits des femmes, ces dynamiques ouvrent des brèches essentielles pour la reconstitution d’un camp progressiste, à condition de garder à l’esprit une orientation de classe.

En effet, depuis 2016, des milliers de femmes apprennent à agir et à nommer leurs problèmes dans le langage des affaires publiques. Cela se passe dans tout le pays et comme le disent les autrices, nous pourrions donc être au seuil du changement social. Nous avons des jeunes issus des grèves pour le climat, des manifestations noires, des marches pour l’égalité et des mouvements de travailleurs. Ils et elles pratiquent déjà un engagement en faveur d’une démocratie participative et inclusive comprise de manière radicale, et rejoignent les luttes pour des motifs variés, renforçant la diversité, les alliances horizontales, au point de pouvoir dire que « nous sommes à l’aube de quelque chose de complètement nouveau ».

L’entretien retrace la récente histoire de ces mobilisations et en précise les enjeux à venir.

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Une brèche ouverte par les manifestations noires

Kacper Leśniewicz – Depuis la création du Fonds féministe (FemFund) jusqu’à aujourd’hui, vous avez reçu plus de 1 200 demandes de soutien financier, dont vous avez inclus la moitié dans votre enquête qualitative[1]. Il s’agit essentiellement d’initiatives émanant de petites villes et de villages. L’ampleur de ce militantisme est énorme par rapport aux normes polonaises. Qui sont les femmes qui s’adressent à vous ?

Marta Rawłuszko – Nous avons été approchées par des femmes précédemment impliquées dans le militantisme, dans des congrès locaux de femmes, par exemple de Slupsk ou de Kalisz. Mais aussi des groupes qui ont émergé des protestations et des grèves locales en 2016. Il y a également des femmes qui sont dans des cercles de ménagères rurales et des femmes qui n’étaient pas impliquées auparavant dans des activités qualifiées de féministes, par exemple des mères soutenant des personnes handicapées.

Magdalena Grabowska – C’est une sorte de kaléidoscope. Si l’on considère l’autonomisation et la résistance des femmes dans une perspective historique plus large, on voit là une marée montante du féminisme polonais.

Il existe des…

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Auteur: redaction