« Le fonctionnement des Verts rend difficile les alliances avec d'autres partis »

« Mal connu, caricaturé, pris dans la polysémie du mot écologiste, le parti Vert reste à bien des égards une énigme, que la prétention plus que jamais affirmée de ses représentants à gouverner la France invite à résoudre. » C’est ainsi que débute l’ouvrage de la politiste Vanessa Jérome. Intitulé Militer chez les Verts (Presses de Sciences Po, 2021), ce livre analyse les ressorts de l’engagement chez Europe Écologie-Les Verts (EELV). Dans cet entretien avec Reporterre, la chercheuse décrypte la stratégie et la dynamique d’un parti devenu central dans la vie politique française.


Reporterre — Vous insistez sur l’habitus minoritaire, comme « fondement et destinée de l’être Vert ». De quoi s’agit-il ?

Vanessa Jérome — Pour ce livre, je me suis penchée sur les vies des militants Verts. Cet engagement est difficile, raillé, moqué, minoritaire dans le champ politique et je voulais comprendre pourquoi des gens s’acharnaient depuis 1984 à militer sous cette bannière, en se faisant insulter, en ayant très peu d’espoir de gagner des élections. En creusant, j’ai découvert que tous ces militants ont intégré – et parfois très tôt dans leur existence – la sensation d’être différents, uniques. Ils viennent de familles de dissidents politiques, ils sont le premier ou le plus diplômé de leur fratrie, la seule personne LGBT de leur milieu… Alors qu’ils ne sont pas les seuls à être dans ces cas, cette sensation les influence tout particulièrement. Elle structure leur rapport au monde, l’idée qu’ils se font de leur place dans celui-ci, et la manière dont ils se comportent. C’est de ce constat que je tire l’affirmation selon laquelle leur habitus est structuré sur le mode minoritaire.

Autrement dit, le parti Vert a constitué une terre d’accueil pour ces personnes qui se ressentent comme minoritaires ?

Oui, car le parti se donne à voir comme un parti différent de tous les autres, sur le fond et dans son fonctionnement. Il se présente comme le premier et le seul parti de l’écologie, celui qui a politisé le climat, la biodiversité, la condition animale, les méfaits du productivisme ou encore le lien entre inégalités sociales et environnementales ; celui qui a eu raison « avant tous et contre tous », une sorte d’avant-garde politique. Son fonctionnement, très complexe, est aussi très original. Pour simplifier, on peut dire que c’est une fédération de régions dotée d’une direction nationale, qui sélectionne l’essentiel de ses cadres et de ses…

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Auteur: Lorène Lavocat (Reporterre) Reporterre