Le foot, un sport disséqué par les sciences mais au résultat souvent imprévisible

Alors que le football compte le plus grand nombre de pratiquants dans le monde, 265 millions de joueurs (4,6 millions en France) selon la FIFA, il représente aussi le sport le plus étudié sur le plan scientifique. Dans Medline, l’une des bases de données bibliographiques biomédicale les plus importante, indexant des articles depuis 1946, le football avec plus de 14 000 références répertoriées dépasse de plus de 60 % le second sport le plus étudié (le tennis).

Comme le relève Donald Kirkendall, membre du Centre d’évaluation et de recherche médicale de la FIFA et du Comité américain de médecine sportive du football, ce corpus très quantitatif d’études exprime des tendances, des sujets prédictifs de recherche au cours du temps. En effet, des sujets spécifiques se dégagent dans la comparaison du football avec d’autres sports collectifs.

Les problématiques sur les blessures et leurs préventions, l’optimisation de l’entraînement pour de meilleures performances physiques, les niveaux de jeux lors des matches, se révèlent récurrentes. Les sollicitations du système cardio-vasculaire dans l’alternance des actions de jeux où les joueurs aux comportements hybrides marchent, courent, sprintent et récupèrent de manière passive ou active, intéressent particulièrement les auteurs pour les optimiser.

Enfin, la croissance exponentielle du nombre d’études recourant aux nouvelles technologies (GPS, cardiofréquencemètres et autres capteurs) et notamment à l’intelligence artificielle reste un constat de progression majeur.

Intégrer l’individuel dans le collectif

Sous cet aspect de mesures quantitatives, il existe depuis 2005 à Neuchâtel, en Suisse, l’Observatoire du football, un groupe de recherche spécialisé dans l’analyse statistique du football, intégré au Centre International d’Étude du Sport (CIES). À partir de 2010, l’Observatoire a développé un modèle d’analyse du footballeur où sa performance comme elle se doit, est intégrée dans son contexte de jeu collectif. C’est-à-dire que l’efficacité du joueur est perçue dans son milieu d’évolution, dépendant principalement de turbulences physiques collectives et spatio-temporelles (entre autres car les spectateurs, la météo, le lieu du match… influencent aussi cette performance).

Entouré de partenaires mais aussi d’adversaires, l’efficacité du joueur se déplace dans des zones de jeux spécifiques sur le terrain. Cela conditionne la nature de ses déplacements et réciproquement influence ses techniques. D’autre part, la perception de l’écoulement du temps fluctue en fonction du score du match et du différentiel positif ou négatif de l’équipe.

Il existe une réciprocité entre les caractéristiques dynamiques voulues du jeu et celles des joueurs, qui doivent posséder une morphologie adaptée pour exercer au plus haut niveau leurs qualités physiques de bases telles que : l’endurance, la résistance, la force, la vitesse, la coordination et la souplesse.

Dans ce contexte de jeu mouvant, des chercheurs caractérisent des profils techniques de joueurs selon une approche par rôle. Un modèle de performance du footballeur par l’intermédiaire de huit domaines eux-mêmes subdivisés en variables se dessine :

  • la défense aérienne (duels aériens gagnés – défense),

  • la défense au sol (duels au sol gagnés – défense),

  • la récupération (reprises de balles perdues/interceptions),

  • la distribution (passes),

  • la percussion (centres/dribbles réussis),

  • la mise en danger (passes pour occasions/passes de but),

  • la finition (tirs),

  • l’attaque aérienne (duels aériens gagnés – attaque).

Ces indicateurs permettent de dresser le profil technique spécifique des joueurs tout en facilitant leurs comparaisons tout au long d’une saison. Il est possible de tester ce profilage sur le site de l’Observatoire du football CIES, alimenté par les données de la société spécialisée dans les données sportives InStat avec des joueurs de renommée mondiale ayant par exemple obtenu entre autres le ballon d’or : Karim Benzema (2022), Lionel Messi (2021…), Luka Modric (2018), Cristiano Ronaldo (2017…).[]

Exemple du profil technique de Karim Benzema, ballon d’or 2022

Karim Benzema.

Dresser le profil sur l’efficacité d’un joueur de football reste difficile, d’autant plus qu’il dépend du potentiel de son équipe, des stratégies…

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Auteur: Philippe Campillo, Maitre de conférences STAPS, Université de Lille