Le ministère de l'Intérieur attaque notre liberté d'informer. Reporterre ne cèdera pas

L’essence du journalisme, c’est d’aller voir et de raconter ce qu’on voit. Non pas parler sur des plateaux télévisés, non pas multiplier les commentaires, non pas arranger des dépêches, des rapports et des communiqués, mais aller sur le terrain, écouter, interroger, observer, éprouver la réalité physique et humaine des situations, et puis raconter. Quand Albert Londres a parlé des bagnes de Cayenne, il avait été dans les bagnes de Cayenne. Quand George Orwell a décrit la pauvreté en Angleterre, il avait vécu des mois dans une pension misérable anglaise. Quand Ryszard Kapuściński a raconté comme personne ce qu’est une dictature, il avait passé des semaines en Iran à observer et à écouter le régime du chah. Ce qu’ont fait trois des plus grands journalistes qui ont honoré la profession d’informer et en sont des modèles, c’est ce travail de… reporter. Aller sur le terrain, regarder, écouter, raconter.

C’est pour cela que nous nous appelons Reporterre : être les reporters de la Terre. Aller sur le terrain, regarder, écouter, raconter. Si ce journal est ce qu’il est aujourd’hui, c’est parce qu’on m’empêchait, dans le journal où j’étais alors, de faire ce travail, en l’occurrence à Notre-Dame-des-Landes, où la police attaquait violemment les écologistes qui défendaient cette zone humide. Il fallait créer un média libre où les journalistes iraient sur le terrain, regarderaient, écouteraient et raconteraient. Et si, depuis, nous multiplions les enquêtes et les analyses, le cœur de notre travail reste le reportage. C’est parce que nous étions sur le terrain que nous avons pu révéler que les gendarmes avaient tué Rémi Fraisse à Sivens, que nous avons pu documenter les violences policières pendant la contestation de la loi Travail, que nous avons raconté la nouvelle offensive contre la Zad de Notre-Dame-des-Landes — une des journalistes de Reporterre y avait été blessée —, que nous avons montré de l’intérieur comment on travaille dans les entrepôts d’Amazon, que nous avons relaté des actions de militants écologistes comme celle consistant à occuper une piste d’aéroport.

Dans ce travail d’aller voir, regarder, écouter, raconter, et comme tous les reporters de tous les médias libres du monde, nous observons : nous ne nous impliquons pas dans l’action, éventuellement illégale, nous n’approuvons ni ne condamnons, nous sommes là pour raconter, et donner les éléments permettant aux lectrices et aux lecteurs de juger, de se former une opinion, et…

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Auteur: kempf Reporterre