Le moment de vérité — Dominique MUSELET

Quand j’allais à l’école, dans les années 1960, la chronologie présidait encore à l’enseignement des matières. Au fil des réformes néolibérales, la chronologie des événements a été abandonnée au profit de vignettes historiques, géographiques, littéraires, artistiques, choisies pour illustrer un sujet à la mode (les migrations, le racisme, l’orientation sexuelle) sans aucune autre logique.

Les événements sont coupés de leurs causes et de leurs effets, si bien qu’on ne peut pas les comprendre et, d’ailleurs, ça n’a pas d’importance. La question du pourquoi a été rayée de la langue française, car probablement trop dangereuse pour les pouvoirs en place. Les élèves sont promenés à travers l’histoire, la géographie, les auteurs, un peu comme des touristes dans un bus. Le bus s’arrête, les touristes descendent, prennent des photos tout en écoutant distraitement le guide et remontent. Ils ne viennent pas découvrir un pays, une langue, une culture, ni faire connaissance avec ses habitants, et ils seraient le plus souvent même incapables de placer sur une carte l’endroit où ils sont. Leur seul but est de prendre des photos qu’ils pourront fièrement exhiber à leur retour, tels des diplômes arrachés haut la main, en se vantant du nombre de pays qu’ils ont fait : Moi, l’année dernière j’ai fait le Zimbabwe, l’année prochaine, je ferai la Corée du nord.

Pour l’enseignant d’histoire, de géographie, de français ou même de science, c’est à peu près la même chose. La seule chose qui lui importe, c’est de boucler le programme à la fois utopique, démesuré et superficiel imposé par sa hiérarchie pédagogiste, sans y laisser sa peau.

Soi-disant placés au centre du système éducatif, mais en réalité abandonnés à eux-mêmes, les pauvres enfants deviennent plus bêtes, plus déboussolés, plus malheureux et plus dégoûtés de l’école et de l’étude, d’année en année, mais qu’importe ! Ils sont destinés à faire de la chair à canons, docile et corvéable à merci, pour les industriels, les généraux, les milliardaires et les dirigeants, tous plus avides, plus corrompus et plus inhumains les uns que les autres, maintenant que plus rien ne les arrête puisqu’ils ont réussi à se débarrasser de tous les contre-pouvoirs.

Lorsque l’éducation nationale a fini son travail d’abrutissement, les médias qui diffusent la propagande d’Etat prennent la relève : il ne s’agirait pas que la piétaille abêtie et embrigadée se réveille au moment où elle va devenir…

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Auteur: Dominique MUSELET Le grand soir