Quasiment inconnu en France, le mouvement révolutionnaire naxalite, basé dans les forêts du centre et de l’est de l’Inde, est en guerre depuis 50 ans contre l’État indien. Ces dizaines de milliers d’hommes et de femmes qui s’engagent dans la lutte armée et que les médias présentent comme un groupe terroriste sanguinaire, sont des membres des basses castes (appelés dalits) et des communautés autochtones de la forêt (appelés adivasis), allié·es à des rebelles héritier·es du marxisme-léninisme. Dans un pays qui se présente comme « la plus grande démocratie du monde », les naxalites tentent de préserver leurs pratiques égalitaires et leur économie de subsistance face à un déferlement de projets d’infrastructure et d’extraction minière et forestière.
Dans Nightmarch (2019), Alpa Shah, anthropologue anglaise d’origine indienne, a raconté l’histoire de ce mouvement, ses victoires et les contradictions qui le traversent. Ce récit à la première personne, qui suit les marches nocturnes d’une escouade naxalite à travers les forêts et les villages de l’Est de l’Inde, sera publié en français début 2022 par les Éditions de la dernière lettre sous le titre Le livre de la jungle insurgée. Pour soutenir ce projet, on peut d’ores et déjà acheter le livre en souscription ici.
Cette préface inédite d’Alpa Shah montre comment, depuis la pandémie, le gouvernement suprémaciste hindou s’est appuyé sur le confinement pour intensifier sa traque des naxalites et de leurs soutiens, des musulman·es et de toute forme de pensée critique dans la presse et les universités.
L’Inde est en passe de devenir une gigantesque prison. À cause du confinement décrété en mars 2020 sur tout le territoire national, mais aussi parce l’État, depuis des années, s’est mis à cadenasser la vie des gens ordinaires. Pour moi, cet enfermement a commencé au cœur du pays, dans les forêts de l’Est où vivent les adivasis – les peuples autochtones de l’Inde. Là, les services de sécurité de l’État ont encerclé les collines, reçu l’ordre d’occuper les écoles et les centres de santé et ont livré les villages au chaos. Celles et ceux qui n’ont pas pris la fuite une fois leurs maisons incendiées sont considérés comme « terroristes » ; on ne leur promet la liberté que s’ils y renoncent au préalable, faute de quoi ils sont jetés en prison. Dans le seul État du Jharkhand, plus de 4000 adivasis seraient actuellement détenus préventivement sous l’accusation…
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Auteur: lundimatin