Le plan d'évasion

Avec ce sixième et dernier épisode, on achève ici la série « Enjoy the ride • Terrorisme des sentiments moraux » entreprise avec le peintre Lawand. Il aura fallu la découverte du prophète de « l’art de ne pas écrire de livres » Mircea Cărtărescu pour comprendre ce qui s’y jouait : un plan d’évasion. Mais il n’y a jamais eu rien à comprendre. Tout est à expérimenter.

Chaque fois que j’ai lu le Solénoïde de Cărtărescu, il m’a semblé que je buvais à la paille la cervelle d’un caméléon panthère (furcifer pardalis, qu’on appelle « l’endormi » partout où on ne sait plus rêver, même sur les îles) et que la pensée caméléonidée atteignait alors sa forme hypercubique de la quatrième dimension. Parfois, le corps à demi-baigné dans cette cervelle, je marchais le long d’une ligne à dépiquer les rêves, les formes et les couleurs qui persévéraient à vouloir naître ailleurs. Parfois, la paille me servait à respirer cet air d’ailleurs. D’ailleurs ! J’ai gravé à l’épingle sur mon cerveau, comme en tatouage, la seule question qui vaille la peine qu’on s’y penche (et qu’on y tombe peut-être, qu’on s’y noie, ce serait quelque chose au moins, peut-être un événement) qui est celle de toute littérature : « Comment sortir de ton propre crâne en peignant une porte sur la surface intérieure de l’os du front, lisse et ambrée ? ». Parce que… les amibes mangent le cerveau (Naegleria fowleri) et Wikipédia fait de la poésie au sujet du règne ancestral des Excavés hétérotrophes, qui se déplacent en se déformant et en émettant des extensions membranaires (pseudopodes), ainsi infestent ta tête en remontant la voie Nord-Nord-Est de la muqueuse nasale, leur Mont Analogue à elles, jusqu’à la Grande Lésion de ta pensée, la fêlure-eucaryote et ses éons étranges, l’invasion des pixels polychromes : les augures et les promesses à soi, confuses, de grandes cavales. Parce que… la pensée fatigue en son calvaire, toujours pleine d’impatientes nomenclatures et de cartes toutes plates qui fournissent l’image fausse du monde. L’échelle microscopique des énormes erreurs de perception. Et l’échelle à côté, qui ne repose sur aucun mur mais qui tient droite toute seule à la verticale, l’échelle infinie qui permettrait de s’évader de l’horrible monde qui nous enserre. Le monde émondé, dépeuplé, raboté par la connaissance du monde, émondé, dépeuplé, raboté par la…

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Auteur: lundimatin