Le pneu au piquet

« Ciel noir sur Alep : des habitants brûlent des pneus pour échapper aux bombes », titre Les Observateurs de France 24. Toutes sortes de pneus usés sont récupérés dans les garages, les dépôts ou à même les voitures immobilisées. À l’aide de sacs plastiques et de torches en tissu la multitude de monticules maillant la ville s’enflamme. Une fumée noire se dégage, protégeant pour un temps les habitants des raids aériens : « Nous n’avons pas des réserves sans fin de pneus à brûler mais nous nous félicitons de notre ingéniosité », témoigne un incendiaire. Deux ans plus tard, en 2018, le Hamas emprunte la même technique en organisant à Gaza une « journée des vieux pneus », au cours de laquelle des milliers de pneus sont brûlés le long du mur contesté. Cette fois, l’écran de fumée est utilisé pour s’approcher de l’infrastructure coloniale, sans être détecté.

Ailleurs, une fumée charbonneuse, âcre et dense, balafre l’horizon entre terminaux pétroliers, raffineries et désert de La Crau (Var). Des tas de pneus sont en flammes sur la rotonde de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône). On est ici sur un piquet de grève. À l’horizon, les cheminées d’Arkema lâchent leur dernier pet fumeux. « C’est ici que ça va se jouer. Les manifs sur le Vieux-Port, même si on y brûlait des palettes et des pneus, ça ne sert pas à grand-chose. Si on tient dix jours comme ça, le gouvernement est à genoux… On bloque le “blanc” – kérosène, gasoil… –, c’est le nerf de la guerre ! » (Le Dantec 2016). Et on brûle le « noir » de carbone, les pneus. En Argentine, les Piqueteros montent des barricades de pneus enflammés, de clous et de bouteilles cassées ; des milliers de femmes et d’hommes s’assoient, cuisinent, mangent et dorment à tour de rôle. Le Matanzazo, premier piquet de grève massif réalisé dans le grand Buenos Aires (2000), consiste en un barrage routier dressé par…

Auteur: lundimatin
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