Le refus de l'État : une histoire libertaire de l'humanité

Livrons-nous à une petite expérience. Tapez « évolution humaine » dans votre moteur de recherche préféré : apparaît une série d’images, plus ou moins parodiques, représentant « la marche du progrès » humain, depuis les premiers grands singes jusqu’à l’Homo sapiens. Plusieurs illustrations figurent le passage des chasseurs-cueilleurs aux agriculteurs, voire aux employés de bureau contemporains. Comme si le changement de mode de subsistance était inéluctable et, qu’in fine, les sociétés industrielles étaient supérieures aux sociétés agricoles et elles-mêmes aux chasseurs-cueilleurs, ceux-ci étant renvoyés à l’enfance de l’humanité.

On retrouve cette vision simpliste parée d’un vernis scientifique aussi bien sous la plume d’un Jean-Jacques Rousseau (De l’origine et des fondements de l’inégalité parmi les hommes) que sous celles, plus récentes, de Jared Diamond (De l’origine des inégalités parmi les sociétés) et Yuval Noah Harari (Sapiens. Une brève histoire de l’humanité). Depuis Diamond, on a même vu poindre un nouveau genre scientifique : écrire l’histoire longue de l’humanité pour révéler les fondements de nos sociétés. Or, la plupart de ces récits reposent sur un postulat hautement contestable : l’inéluctable apparition de l’agriculture aurait entraîné l’avènement des premiers États et, par conséquent, des inégalités au sein et entre les sociétés. En somme, si vous souhaitez être véritablement libre, renoncez à tout confort et partez vous installer parmi les dernières bandes de chasseurs-cueilleurs, les seules sociétés égalitaires, car les inégalités seraient consubstantielles à l’évolution humaine.

C’est précisément contre ce postulat que le regretté anthropologue David Graeber — il a développé le concept de « jobs à la con » dans l’essai Bullshit Jobs — et l’archéologue David Wengrow ont publié le colossal Au commencement était… Une nouvelle histoire de l’humanité, aux éditions Les Liens qui libèrent, en 2021. En mobilisant les découvertes archéologiques des trente dernières années et en revisitant des études anthropologiques plus anciennes, les deux auteurs décorrèlent non seulement l’invention de l’agriculture de la fondation des premiers États, mais expliquent en outre que, depuis toujours, les sociétés humaines ont fait montre d’une grande créativité politique et sociale.

« Abandonner une fois pour toutes le jardin d’Éden »

Pour éclairer autrement le passé de l’humanité,…

La suite est à lire sur: reporterre.net
Auteur: Reporterre