Le Sénégal renoue-t-il avec la censure médiatique?

Le 10 février 2023, le signal de la chaîne privée sénégalaise Walf TV a été coupé pour sept jours par le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA). Il est reproché au média d’avoir couvert de manière « irresponsable » des manifestations de Mbacké (à 190 km de Dakar).

En effet, les manifestations violentes avaient éclaté après des échauffourées entre les forces de l’ordre et les partisans de l’opposant Ousmane Sonko, ce dernier ayant appelé à un meeting, malgré son interdiction par les autorités administratives. Cependant, sans recourir au préalable à des sanctions administratives telles que la mise en demeure, l’avertissement comme le stipulent les dispositions de l’article 210 du code de la presse au Sénégal de 2017, l’organe de régulation a décidé de la coupure momentanée du signal et en cas de récidive, le média fera l’objet d’une fermeture définitive. Or, ce n’est pas la première fois que Walf TV est suspendue. En 2012, au temps du président Abdoulaye Wade, le même média avait fait l’objet d’une mise en demeure.

La récente coupure du signal de Walf TV par les autorités sénégalaises pose la question du retour rampant de la politique de la censure médiatique et du contrôle de la liberté de la presse, à moins d’un an de l’élection présidentielle de 2024 qui s’annonce tendue.

Grammaire de la politique de la censure

En fonction des régimes politiques, des circonstances et contextes politiques, la volonté de régulation peut s’avérer liberticide pour les médias. Elle peut aussi basculer dans la censure avec pour finalité de réduire certains médias au silence.

Avant d’être un acte, la censure est d’abord discours. Le communiqué du régulateur à l’endroit des responsables de Walf TV mobilise plusieurs procédés de discours. Il est tout d’abord question de rappel à l’ordre. Ce qui laisse penser à une démarche pédagogique et sensibilisatrice. La suite du communiqué se lit comme la menace d’un passage à l’acte en force, le cas échéant, si le média ne se conforme pas ou n’obéit pas à l’injonction du régulateur d’interrompre ses programmes pendant la durée indiquée.

Aussi, le discours de la censure apparaît plutôt ici comme un élément de la puissance publique. Ainsi, force est de constater que sa vocation ne se limite pas seulement à une logique affichée d’intimidation des journalistes dans un contexte…

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Auteur: Simon Ngono, Maître de Conférences en Sciences de l’information et de la communication, Université de la Réunion