Le spectre d’un fichage biométrique des manifestants

Dans le cadre des manifestations contre l’adoption de la réforme des retraites ayant lieu régulièrement dans les grandes villes de France ces derniers jours, les interpellations ont été relativement nombreuses. Le plus souvent, ces arrestations entraînent la garde à vue des personnes concernées mais ne débouchent pas sur des poursuites devant un tribunal.

Pour autant, beaucoup de ces manifestants ont fait état de la prise de leurs empreintes digitales ou génétiques lors de ces gardes à vue, et certains l’ont contesté ou refusé. Dans quel cadre ces prélèvements ont-ils eu lieu et le refus est-il possible ? Plus encore, que deviennent les données ainsi collectées ?

Des interpellations polémiques. JT de France 2, 21 mars 2023

Pour comprendre pourquoi ces empreintes sont demandées, il faut d’abord revenir au contexte juridique de ces arrestations. La décision initiale du placement en garde à vue est prise par un officier de police judiciaire. Elle est possible dès lors qu’il « existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’une [personne] a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement » et qu’elle lui paraît nécessaire. Aucune autorisation judiciaire n’est requise à ce stade.

Or, il existe de nombreuses infractions pénales qui peuvent avoir lieu durant une manifestation. Outre toutes les atteintes aux biens – dégradations ou destructions – ou aux personnes – violences diverses, les forces de l’ordre justifient souvent le placement en garde à vue sur le fondement de l’infraction de « participation à un groupement en vue de commettre des violences ». Celle-ci ne nécessite pas d’acte personnel de dégradation ou de violence mais seulement de prendre part à un groupe, même informel et improvisé.

D’autres textes peuvent parfois être mobilisés, comme le fait de dissimuler son visage aux abords de la manifestation ou le fait de se maintenir dans un groupement après des sommations. Néanmoins, contrairement à ce que dit le ministre de l’Intérieur, la seule participation à une manifestation non déclarée ne constitue pas une infraction pénale.

Le prélèvement biométrique en garde à vue

Quoi qu’il en soit, une fois la personne placée en garde à vue, peut-elle se voir obligée de subir un prélèvement de ses empreintes digitales et génétiques ?

La réponse est positive. La prise des empreintes…

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Auteur: Yoann Nabat, Doctorant en droit privé et sciences criminelles, Université de Bordeaux