Le Trio infernal : Poutine, l'Otan et les néonazis

L’argument officiel de l’agression militaire lancée par Poutine le 24 février dernier est la « dénazification de l’Ukraine ». Et les gouvernements qui composent l’Otan s’accordent à y reconnaître une « propagande » du Kremlin visant à justifier l’injustifiable : la répression brutale des aspirations du peuple ukrainien à bâtir un Etat indépendant.

Le problème est que pour dénoncer la propagande du Kremlin, les démocraties occidentales se livrent à une propagande tout aussi peu reluisante : « Le néonazisme en Ukraine ? A part quelques groupuscules ultra minoritaires, rien à signaler… ».

Hélas, la vérité est d’une tout autre nature : de fait, il n’y a pas un pays au monde, aujourd’hui, où les néonazis ont acquis une influence d’une telle ampleur. Des monuments y sont érigés à la gloire de Petlioura, le chef d’une armée de pogromistes qui au sortir de la première guerre mondiale a assassiné entre 60 000 et 100 000 Juifs ukrainiens. Et le nom de Stepan Bandera y est devenu une sorte de signifiant maître de la révolution nationale ukrainienne ; or, sinon Bandera lui-même, emprisonné dès juin 1941, ses fidèles ont été les supplétifs des nazis au moins jusqu’en 1943, ce qui leur donna l’occasion de mettre en pratique leur vision de la nation : ils ont été des nettoyeurs ethniques de l’Ukraine durant l’invasion nazie, massacrant, au nom de la guerre menée contre les « partisans », des Polonais, des Russes et, bien sûr, des Juifs.

Dans sa Destruction des juifs d’Europe, Raul Hilberg écrit, au sujet de l’activisme des nationalistes ukrainiens ayant rejoint les nazis sur ordre de leur chef Bandera : « On leur laisse de préférence le travail le plus ingrat. L’Einsatkommando 4a alla jusqu’à ne plus vouloir exécuter que les adultes, laissant les enfants à ses acolytes ukrainiens » (T. 1, Gallimard, p. 271).

Certes, « Bandera » est aujourd’hui devenu, aux yeux de nombreux Ukrainiens, le symbole d’une légitime aspiration nationale et non une référence à la collaboration avec le régime nazi. Mais cela même sanctionne la victoire idéologique et iconologique des néonazis qui, depuis la révolution dite de « l’Euromaïden », ont su imposer à l’Ukraine leur agenda politique, leur historiographie et leurs icônes, avec l’appui plus ou moins discret des Européens et des Etats-Unis.

Le reconnaître ne revient pas à embrasser la rhétorique du Kremlin. Bien au contraire : il est certain que l’agression militaire de Poutine…

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Auteur: lundimatin