L’économie, une continuation de la guerre par d’autres moyens

Cet article explore les transformations de l’économie mondiale provoquées par la guerre en Ukraine[1]. Il prolonge l’analyse réalisée dans un article publié au début de la pandémie de Covid-19, qui constatait un resserrement des relations entre économie mondiale et géopolitique depuis la fin des années 2000 (« le moment 2008 ») et l’érection par les gouvernements des pays développés de barrières protectionnistes au motif de sécurité nationale (Serfati, 2020). Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février 2022, c’est la guerre qui impose sa loi dans les relations économiques internationales. Le monde est passé des guerres commerciales à la guerre tout courtLes conflits entre grands pays mobilisent aujourd’hui des moyens militaires et des instruments économiques. On peut donc, en transposant l’aphorisme énoncé par Carl von Clausewitz [2], observer que dans la situation actuelle, l’économie est la continuation de la guerre avec d’autres moyens.

La première partie de cet article met en évidence la fragmentation de l’économie mondiale produite par les rivalités géopolitiques. Les dirigeants de l’Union européenne (UE) et des États-Unis ont resserré les rangs face à l’agression russe [3] et présentent une unité qui semblait improbable il y a quelques années. Ils proposent la constitution d’un « Otan économique » qui prolongerait l’alliance militaire unissant les pays de la zone transatlantique et appellent les groupes de ces pays à relocaliser leurs chaînes mondiales d’approvisionnement dans des « pays amis ». L’objectif déclaré est de faire face à la Chine qui est qualifiée de « rival systémique » par les États-Unis et l’UE. La deuxième partie s’interroge sur la faisabilité de ce projet. La troisième partie évalue les effets des sanctions économiques prises par les pays occidentaux contre la Russie. La dernière partie discute les relations entre l’interdépendance économique et les rapports géopolitiques. 

Consolidation du bloc transatlantique autour d’un « Otan économique »

Peu de temps après la grande crise financière de 2008, la secrétaire d’État Hillary Clinton proposait que le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI [4]) négocié entre les États-Unis et l’UE et qui avait déjà pour objectif de contrecarrer l’ascension de la Chine et plus généralement des Brics (Afrique du Sud, Brésil, Chine, Inde et Russie), constitue un véritable « Otan…

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Auteur: redaction