L'effondrement historique du journalisme (Consortium News) — Patrick Lawrence

Je ne me suis jamais remis d’un article que le New York Times a publiée dans son magazine du dimanche en mai 2016. Peut-être vous en souviendrez-vous. Il s’agissait d’un long portrait de Ben Rhodes, le conseiller principal de l’administration Obama pour les « communications stratégiques ». Il était écrit par un journaliste nommé David Samuels.

Ces deux-là formaient une paire étonnante – appropriée, dirais-je. Rhodes était un écrivain de fiction en herbe vivant à Brooklyn lorsque, par le plus grand des hasards, il s’est retrouvé dans le cercle restreint de la Maison Blanche d’Obama. Samuels, un pigiste qui couvrait habituellement les célébrités de la culture populaire, avait depuis longtemps succombé à ce style malheureusement intelligent dont souffrent généralement ceux qui écrivent sur les rock stars et autres personnes plus ou moins frivoles.

Le travail de Rhodes consistait à présenter « une restructuration plus large du récit américain », comme le disait Samuels. « Rhodes est un conteur qui utilise les outils d’un écrivain pour faire avancer un programme présenté comme de la politique ». Un professionnel du marketing tout droit sorti d’Edward Bernays, en clair. Un conteur d’histoires qui trafique avec des faits manipulables et des fins heureuses. « Présenté comme de la politique » : une jolie touche qui traduit la marchandisation de notre discours public.

Rhodes et Ned Price, son adjoint, étaient des acrobates des médias sociaux. Price, ancien analyste de la C.I.A. et aujourd’hui porte-parole du département d’État, a raconté sans inhibition comment ils nourrissaient les correspondants de la Maison Blanche, les chroniqueurs et autres personnes en mesure d’influencer l’opinion publique, comme un producteur de foie gras nourrit ses oies.

Voici ce que disait Price sur cet exercice :

« Il y a en quelque sorte leviers d’appui. Nous avons nos compadres. Je contacte quelques personnes, et, vous savez, je ne voudrais pas les nommer….. Et je leur donne un peu de matière, leur montre la direction, et peu après j’en vois beaucoup en train de publier sur Internet, qui sont suivis par beaucoup de personnes, en train de diffuser le message de leur propre initiative. »

Rhodes a donné à Samuels une analyse plus élaborée de cet arrangement :

« Tous les journaux avaient autrefois des bureaux à l’étranger. Maintenant, ils n’en ont plus. Ils nous appellent pour leur expliquer ce qui se passe à Moscou ou au Caire. La plupart des médias rendent compte des événements mondiaux depuis Washington….

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Auteur: Patrick Lawrence Le grand soir