Est-ce un flirt ? Non. Une romance ? Non plus. Un amour imaginaire ? Pas davantage. Si le terme « crush » est entré dans les dictionnaires en 2023, on se trouve souvent bien en peine dès qu’il s’agit de lui trouver un synonyme.
Il y a quelque chose de flou dans le « crush », de « non-défini dans la définition » pour reprendre les termes de Mehdi, l’un des jeunes rencontrés pour mon enquête intitulée Crush. Fragments du nouveau discours amoureux, quelque chose qui nous renvoie donc à toutes ces interrogations contemporaines autour de l’amour, des fondements du couple, de la place qu’on lui donne ou encore des espaces de la rencontre amoureuse.
Même s’il n’est arrivé qu’il y a une dizaine d’années chez les adolescentes et les adolescents français, le terme « crush » est ancien. Un dictionnaire d’argot américain retrace son étymologie de l’ancien français à l’anglais, au XIVe siècle. On le retrouve beaucoup plus tard, à la fin du XIXᵉ siècle aux États-Unis. Des chercheuses qui ont travaillé sur les archives des universités qui se créent alors, notamment sur des journaux intimes d’élèves, montrent que le terme fait complètement partie du folklore estudiantin.
À la fin du XIXe siècle, une étudiante américaine de première année se doit d’avoir un crush pour une étudiante d’un niveau supérieur. Une bascule s’opère à la charnière du XXᵉ siècle : le crush est alors pathologisé, des articles sont publiés pour alerter les mères des dangers que courent leurs filles à avoir des crushs, présentés comme des voies vers le lesbianisme, faisant peser un risque pour la natalité. Ce moment de bascule est la première trace d’un usage massif du terme « crush » par rapport à la vie sentimentale des jeunes, qui fait ensuite flores dans la culture populaire américaine, notamment dans la chanson.
Derrière le flou inhérent au crush, les entretiens avec les…
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Auteur: Christine Détrez, Professeure de sociologie, ENS de Lyon