Alors qu’un mouvement de grève est appelé ce mardi, nos amis de Temps critiques nous proposent cet article de fond pour essayer de décrypter où nous en sommes avec le travail.
Au début de l’industrialisation, les conditions de classes comme celles qui caractérisent bourgeois et prolétaires sont incommensurables. L’énoncé révolutionnaire républicain de la Déclaration des droits de l’homme (le genre humain) ne contrevient pas à ce caractère. La théorie de Tocqueville sur la démocratie non plus puisque, pour lui, l’égalité en jeu n’est que celle de l’égalité des statuts et la fin des privilèges qui y sont liés. L’abolition des privilèges ne débouche donc pas sur l’abolition des inégalités, une thématique que seul Babeuf abordera, de façon ultra minoritaire et sans succès. Cette question des inégalités suppose en effet, pour qu’elle apparaisse au grand jour, la fin d’une société scindée en blocs relevant finalement plus d’une logique de caste que d’une logique de classe comme l’atteste le retour de la royauté puis de l’empire, un exemple de « résilience » avant la lettre. Les quelques réformes sociales de la Troisième république afin de faire face à ce qu’on appellera « la question sociale », mais dans un tout autre sens qu’aujourd’hui, n’empêcheront pas que se dégage, au tournant du siècle, un important courant prolétarien dans la perspective de la grève générale insurrectionnelle pour l’abolition du salariat.
La lutte contre les inégalités n’est donc toujours pas prépondérante au sein d’un mouvement ouvrier encore peu intégré au rapport social capitaliste et considéré comme composé en partie de « classes dangereuses ». Ce cadre perdure en gros jusqu’au début des années 1920 puisqu’après les défaites des révolutions allemande et hongroise et des conseils de Turin, la classe ouvrière est intégrée aux institutions en tant que classe productive et nationale, que ce soit dans les démocraties occidentales ou dans les différentes variétés de fascisme. Le développement d’un « droit du travail », ensuite, consacre à la fois cette intégration du point de vue du capital et le glissement, côté prolétarien de la lutte anticapitaliste conçue comme abolition du salariat. La formule de la CGT syndicaliste révolutionnaire de 1906 est jetée aux orties au profit de la recherche d’un rapport de forces permettant de faire triompher des revendications « sociales » détachées de leur soubassement politique et de la perspective révolutionnaire.
En effet, dans la société capitaliste…
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Auteur: lundimatin