Les gens du Moyen Âge étaient-ils plus écolos ?

Qu’ont en commun le Roman de Renart, ensemble médiéval de récits animaliers, les statuts de l’ordre cistercien et les poèmes de Rutebeuf ? Tous racontent, à leur manière, la plus longue période de croissance économique et démographique qu’a connue l’Europe durant le Moyen Âge, plus précisément du XIIe au XIVe siècle. De cette connexion entre « besoin et développement, sobriété et consommation », l’historien Mathieu Arnoux en a tiré un fil conducteur dans son essai Un monde sans ressources (Albin Michel). Et y analyse la tentative d’établir un mode de vie durable.

Le livre résonne aujourd’hui, alors que la transition écologique reste l’un des enjeux majeurs actuels pour répondre au défi climatique. Car, à la différence des périodes de développement enregistrées depuis la révolution industrielle, la croissance médiévale n’a pas reposé sur l’exploitation d’énergies fossiles, mais sur une habile combinaison d’énergies renouvelables (dont les cours d’eau) et de travail organique (humain et animal). En Europe, le déclin économique et démographique depuis la chute de l’Empire romain avait laissé une place au monde sauvage. Mais les besoins d’une population grandissante fit que les Européens se lancèrent très vite dans une transformation effrénée des paysages. Particulièrement dans la métropole parisienne.

Pour nourrir la région, forte de près de 250 000 âmes au milieu du XIVe siècle, les pouvoirs locaux et les Capétiens aménagèrent le bassin versant de la Seine. La vallée de la Bièvre, au sud-est de la capitale, bientôt peuplée de moulins à eau, se mua en « couloir énergétique » afin d’alimenter Paris en blé. L’énergie hydraulique se développa. De même pour l’industrie minière du fer, indispensable à tous les objets de la vie courante et à la construction, qui entraîna la déforestation de nombreux coins boisés du royaume.

Le travailleur, une marchandise comme une autre

En parallèle, le travail humain et animal s’intensifia. Les chevaux, plus efficaces que les bœufs, furent attelés aux charrues afin d’augmenter la productivité dans les champs. Mais l’innovation majeure vint d’un acteur inattendu : l’ordre de Cîteaux, un ordre monastique de droit pontifical. Au milieu du Moyen Âge, les moines blancs conçurent un autre rapport au travail en sortant de leur autarcie vivrière et en transformant leurs productions agricoles, artisanales et industrielles. L’Ordre devînt même rapidement « un réseau continental assurant la production et la commercialisation en masse de produits de consommation ». Pour atteindre une telle ampleur à l’échelle européenne, les Cisterciens ont mis au travail des frères des monastères, des…

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Auteur: Reporterre