« Les industriels essaient d'orchestrer le doute sur la dangerosité des pesticides »

Basta! : Les pesticides, aujourd’hui considérés comme à l’origine d’une pollution majeure, ont d’abord été considérés comme une sorte de miracle. Pouvez-vous nous raconter pourquoi ?

François Dedieu : À la sortie de la Deuxième Guerre mondiale, les besoins pour nourrir les populations française et européenne sont considérables. Apparaît alors une nouvelle technologie chimique : les pesticides agricoles, qui viennent de l’industrie de l’armement, et qui sont effectivement considérés comme miraculeux, car peu chers, très efficaces, et permettant un gain de temps considérable.

François Dedieu

Sociologue à l’institut national de la recherche agronomique et de l’environnement (Inrae), ses recherches portent sur l’action publique en matière environnementale. Il a publié en 2022 Pesticides. Le confort de l’ignorance (Seuil).

Cette technologie était réellement vue comme d’une grande modernité à l’époque, puisqu’elle allait permettre de quitter le dur labeur des champs. Elle a accompagné tout le développement de l’agriculture intensive, jusqu’à aujourd’hui. Néanmoins, depuis les années 1990, le regard que l’on porte sur ces produits a changé de manière plutôt spectaculaire, puisque les pesticides sont aujourd’hui considérés comme un problème écologique majeur en France, en Europe et dans le monde.

Quelles sont les raisons de ce changement de regard ? Et y a-t-il une spécificité française ?

Le changement de regard arrive en fait très peu de temps après l’apparition des pesticides, dès les années 1960 avec la publication du livre de la biologiste américaine Rachel Carson, Printemps silencieux. C’est la première qui se penche sur cette question des effets des pesticides.

Elle constate deux choses : on retrouve des pesticides partout dans l’environnement, et ils ont des effets délétères. Elle s’aperçoit par exemple que l’épaisseur des œufs dans les…

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Auteur: Nolwenn Weiler