Les lucioles écoféministes prennent la relève


C’est presque devenu un lieu commun de l’écrire, l’été 2022 aura été déroutant pour beaucoup de monde. Les canicules, sécheresse et incendies en France auront sans doute provoqué un choc émotionnel, dont nul ne peut toutefois prédire s’il en résultera une prise de conscience, la vraie, celle qui relie le cerveau aux tripes en faisant clairement percuter que nos vies ne seront plus jamais les mêmes.

J’ai moi-même passé quinze jours en apnée, pendant que 380 hectares du Vercors partaient en fumée. La chaleur était suffocante. Je m’étais installée au frais dans la grange ouverte et plongée dans l’ambiance victorienne des sœurs Brontë, dans une tentative désespérée de changer d’époque. Incapable de me concentrer, je n’arrivais qu’à scruter le bal des hélicoptères, inquiète et meurtrie, sans réussir à me sortir de l’esprit que quinze années de militantisme et de combats atterrissaient là, dans cet incendie aux portes de chez moi. L’issue aurait pu être plus dramatique et cela a été bien pire à d’autres endroits, il n’empêche. Les herbes du jardin grillées, la fumée piquant les yeux, la fuite des animaux, l’épuisement des pompiers, le vertige et l’effroi… Le soir, l’air avait une odeur de cendre mouillée.

Et pourtant, l’été a passé et l’automne qui arrive semble vouloir en recouvrir les stigmates. Les feuilles roussies avant l’heure, si angoissantes durant l’été, arborent une teinte dorée désormais en phase avec la saison. Il redevient, fin septembre, logique de voir le débit des rivières diminué. Les pluies de la fin de l’été ont même reverdi les jardins brûlés et donnent des airs de printemps au potager. Mes fleurs de capucine, stoppées net au début de l’été, fleurissent enfin. Les concombres qui étaient restés en dormance se réveillent et se mettent à s’enrouler comme des lianes ; je vois même des fleurs de courgette d’ici. Tout semble rentrer dans l’ordre. Et c’est peut-être le plus inquiétant.

Bien sûr, on ne peut que se réjouir de la capacité des éléments à se remettre et la forêt a maintes fois fait la démonstration de sa capacité à revivre après le feu. La romancière Jean Hegland, avec qui j’ai beaucoup correspondu cet été, a témoigné de la manière dont la forêt où elle vivait, ravagée par les incendies en Californie, renaît peu à peu. J’avais beau être convaincue cet été, assommée par l’étendue du désastre, que certains arbres étaient définitivement morts, nous n’en avons probablement…

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Auteur: Corinne Morel Darleux Reporterre