Les luttes urbaines dans la Révolution portugaise. Extrait du livre de P. Mailer

Phil Mailer, Portugal 1974-75, révolution manquée ?, Paris, Les nuits rouges, 2019.

Contretemps publie le chapitre 8 de l’ouvrage de Phil Mailer sur le processus révolutionnaire portugais des années 1974-1975. L’auteur y revient sur les luttes urbaines, en particulier autour de la question du logement, et met en évidence à la fois la radicalité de ces luttes et l’activité intense des différents cadres d’auto-organisations qui y étaient à l’oeuvre. Il insiste enfin sur la manière dont se sont développées dans ce cadre les luttes et les revendications féministes.

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Le contexte

L’émigration est une caractéristique de l’histoire portugaise depuis le XVIIe siècle [1]. Mais il y eut aussi des migrations internes. L’exode rural vers les zones urbaines s’accéléra pendant la période d’expansion économique, à partir de 1959. La combinaison – fuite vers les villes et politique du logement du régime salazariste – conduisit à la formation de bidonvilles dans la banlieue de Lisbonne et autour de Porto et de Braga. La promesse tôt faite par Salazar d’« une maison pour chaque Portugais » était devenue, dès 1956, un élément du « développement dual ».

Sedas Nunes, un sociologue, put écrire que « deux sociétés coexistent au Portugal, la “moderne” dépassant rapidement la “traditionnelle” ». Les contradictions du développement capitaliste étaient attribuées aux soi-disant « comportements traditionnels de la population des campagnes », ou « expliquées » par des sermons sur la pauvreté « habituelle ». Ce genre de concepts permettait aux autorités de fermer les yeux sur ce qui se passait en réalité.

Par contraste, les classes moyennes s’en sortaient bien, surtout à Lisbonne et à Porto. La surévaluation du prix des terrains et les programmes de construction de logements coûteux avaient…

Auteur : redaction
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