« Les odeurs sont indescriptibles » : près de Marseille, les voisins d'une cimenterie suffoquent

Bouc-Bel-Air (Bouches-du-Rhône), reportage

En bordure de l’autoroute A7 qui relie Aix-en-Provence à Marseille, les panaches de fumée jaunâtre à l’odeur d’œuf pourri font depuis longtemps partie du paysage. « Les odeurs sont indescriptibles. Il y a des soirs où c’est intenable, l’été on ne peut pas laisser les fenêtres ouvertes tellement c’est insupportable », résume Marie, qui habite à Bouc-Bel-Air depuis 2001. Les hauts silos gris de la cimenterie Lafarge de la Manne — inaugurée en 1958 et responsable de ces odeurs —, Marie les a toujours connus. L’usine bénéficie même d’une dérogation, depuis trois ans, qui a entrainé une intensification des panaches. C’était sans compter la triple mobilisation d’élus locaux, de riverains et d’associations environnementales : un dispositif de surveillance de la pollution de l’air a récemment poussé l’industriel à (légèrement) réduire ses émissions.

Cela n’empêche pas qu’à la sortie des cheminées du site, des gigantesques nuages de fumée s’élèvent toujours chaque jour, particulièrement le soir. Un cocktail composé de poussières, de particules fines, d’ammoniaque, mais surtout de dioxyde de soufre (SO2). C’est ce dernier qui teinte les fumées de jaune et sent si fort. Il est également extrêmement toxique. L’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) précise que « l’exposition au dioxyde de soufre, à des concentrations normalement présentes dans l’industrie ou dans certaines agglomérations, peut engendrer ou exacerber des affections respiratoires (toux chronique, dyspnée [difficulté de respiration]) et entraîner une augmentation du taux de mortalité par maladie respiratoire ou cardiovasculaire (maladie ischémique). »

« L’exposition au dioxyde de soufre peut exacerber des affections respiratoires »

Fabriquer du ciment revient à cuire un mélange de calcaire, d’argile et de sable. Or, pour cuire, il faut alimenter des fours en continu. La cimenterie brûle ainsi tout un tas de « carburants » : coke de pétrole, bois, solvant, pneus… « Les cimenteries sont certifiées pour éliminer toutes sortes de déchets dangereux, dont des solvants issus de rejets d’autres industries chimiques. C’est autant un incinérateur qu’une cimenterie », ironise Claude Calvet, habitant de la zone et membre de France Nature Environnement 13. En 2021, 600 000 tonnes de ciment ont été produites par la cimenterie ; 145 salariés travaillent sur le site et près de 400 autres sont embauchés par…

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Auteur: Marius Rivière Reporterre