Les paysans de plus en plus dépossédés de leurs terres

En France, chaque année, de plus en plus de sociétés financiarisées font main basse sur des milliers d’hectares de cultures agricoles. Un accaparement qui progresse et qui inquiète les associations environnementales Terre de liens et Les Amis de la Terre. Car, qui dit agrandissement des terres, dit généralement destruction de l’emploi paysan et ralentissement des pratiques agroécologiques. Celles-ci détaillent le phénomène dans deux rapports publiés ce mardi 28 février, en marge du Salon de l’agriculture.

L’étude de Terre de liens dévoile des chiffres inédits sur l’état de la propriété des terres agricoles françaises, les derniers rapports sur le sujet remontant à 1982 et 1992. Alors qu’à l’époque, l’accaparement des terres était quasiment inexistant, le phénomène de concentration est aujourd’hui en pleine expansion. Pour l’analyser, l’association a agrégé les rares données disponibles. Deux conclusions s’en dégagent. La première est que quatre millions de petits propriétaires privés, dont la majorité ne sont pas des agriculteurs et ne connaissent pas le métier, se partagent 85 % des surfaces agricoles françaises. Le terrain qu’ils possèdent tourne en général autour des cinq hectares seulement.

La situation est donc compliquée pour les paysans, qui ont en moyenne… quatorze propriétaires. C’est autant de baux à renégocier quand un agriculteur souhaite transmettre sa ferme. Les héritages risquent d’encore augmenter le nombre de ces propriétaires, aujourd’hui en majorité retraités. « La distance augmente entre celui qui travaille la terre et celui qui la possède », note Tanguy Martin.

Contrôler toujours plus de terres

Un second phénomène vient se superposer à ce paysage en pleine recomposition. Un nouveau type d’acteur a émergé en trente ans : les « sociétés agricoles financiarisées », écrit Terre de liens. Ces sociétés — où toute personne, physique ou morale, peut acquérir des parts même si elle n’a rien à voir avec l’agriculture — contrôlent actuellement 14 % de la surface agricole utile française, par achat, ce qui représente 650 000 hectares, ou location. Actuellement, une ferme sur dix est enregistrée sous ce statut.

« La Roumanie, où des multinationales possèdent des exploitations de 65 000 hectares et où 40 % des exploitations sont détenues par des investisseurs montre vers quoi l’agriculture française se dirige si rien n’est fait », alerte le rapport des Amis de la Terre.

L’association décrit deux types d’« accapareurs », qui par des opérations de montages financiers contournent la réglementation afin de s’approprier toujours plus de terres. Les premiers sont les « agrimanagers ». À…

La suite est à lire sur: reporterre.net
Auteur: Marie Astier Reporterre