« Les plus de 50 ans sont surreprésentés parmi les victimes d’accidents du travail mortels »

 

Une marche blanche est organisée ce samedi à Paris par le collectif Familles : stop à la mort au travail. En pleine bataille contre la réforme des retraites, il est plus que jamais temps de rappeler que les mauvaises conditions de travail peuvent tuer, surtout après 50 ans. Entretien avec Mathieu Lépine, auteur du livre L’Hécatombe Invisible, qui porte sur les accidents de travail mortels.

 

Pendant quatre ans, Matthieu Lépine, professeur d’histoire-géographie en Seine-Saint-Denis, a recensé quotidiennement les accidents du travail mortels sur son compte Twitter Silence des ouvriers meurent et publié les témoignages de leurs proches sur son site Une Histoire Populaire. Son premier ouvrage, L’Hécatombe Invisible, paraîtra le 10 mars aux éditions du Seuil.

 

Rapports de Force : Vous aviez démarré votre recensement début 2019, sur Twitter, à partir du cas de Michel Brahim, décédé dans un accident du travail alors qu’il avait l’âge d’être à la retraite. Comment relisez-vous ce cas à l’aune de la séquence actuelle autour de la réforme des retraites ?

 

Matthieu Lépine : D’après les données de l’assurance maladie, sur les 733 personnes décédées dans un accident du travail en 2019, plus de la moitié (404) avaient 50 ans ou plus. Les seniors sont surreprésentés parmi les victimes d’accidents mortels au travail. Plus on arrive en fin de carrière, plus les accidents sont graves. Faire travailler les gens plus longtemps, cela peut inévitablement avoir des conséquences, parfois mortelles.

Le ministre du Travail a été qualifié d’« assassin » au sujet de cette réforme, mi-février. Cette séquence était intéressante à plusieurs points de vue. Déjà, la réponse du ministre : il affirme que depuis 15 ans, il y a une stabilité du nombre de morts. Or, c’est faux. Selon la DARES, il y avait 476 morts au travail en 2005 ; 542 en 2009 ; et 790 en 2019. L’augmentation est significative.

Ensuite, sur l’emploi du terme « assassin » : après la catastrophe minière de Courrières le 10 mars 1906, qui a fait 1 099 morts, les familles qualifiaient d’ « assassins » la compagnie des mines de Courrières. Jaurès lui-même, à l’Assemblée nationale, parlait d’une responsabilité « meurtrière » des grands patrons. À cette époque, ça ne choquait personne. Aujourd’hui – même si ce n’était peut-être pas le terme à employer -, évoquer les responsabilités des politiques dans ces accidents est important.   

 

Votre ouvrage donne de l’épaisseur historique au…

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Auteur: Maïa Courtois