Les poids et les mesures

Le 28 février 2017, les députés socialistes (aujourd’hui NUPES) votaient la dernière loi sécuritaire du quinquennat Hollande. Une série d’articles qui étendait à l’ensemble des forces de l’ordre les règles d’ouverture du feu, jusque là dévolues aux gendarmes et qui leur permettaient d’utiliser leur arme de service en cas de refus d’obtempérer. Une autorisation de tirer, – que certains qualifiaient alors de « permis de tuer »-, sur un véhicule en fuite dans la mesure où celui-ci pourrait, selon l’appréciation immédiate du fonctionnaire, mettre en danger sa vie ou celle d’un collègue.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les policiers en service n’ont pas tardé à faire usage de cette nouvelle liberté (L’IGPN annonce une augmentation de 54% des tirs d’armes à feu sur des véhicules en 2018) et cela commence à s’ébruiter. Le 24 avril ce sont deux passagers d’une voiture garée à contre sens sur le Pont-Neuf qui sont abattus au fusil d’assaut. Le 4 juin, un véhicule bloqué sur le boulevard Barbès se retrouve criblé de neuf balles par des policiers à vélo. Le conducteur qui avait semble-t-il bu et fumé et qui avait déjà perdu son permis de conduire, aurait tenté d’esquiver le contrôle de police. Il est expédié aux urgences puis en détention provisoire. Quant à sa passagère, elle décède d’une balle dans la tête. Le lendemain, à Vienne, un autre conducteur, sans papier, tente à son tour sa chance pour échapper à un contrôle. Là encore, il termine blessé et hospitalisé. Le 8 juin à Montélimar, un homme mal garé s’enferme dans sa voiture, moteur éteint, pour empêcher la fourrière d’embarquer son véhicule. Devant son refus de sortir, un policier municipal se met à imaginer un délit(-délire) ; et si la voiture démarrait soudainement, fonçait sur lui, ses collègues, les passants ? Il dégaine son arme de service et met en joue le réfractaire. « Le geste est peut-être un peu disproportionné » reconnaîtra un porte parole de la Police Nationale..

Cette accumulation de drames dans un laps de temps aussi resséré a suscité une large couverture médiatique. Il s’agit le plus souvent, pour nos confrères journalistes, de retranscrire les éléments de langage des communicants du ministère de l’Intérieur, d’une préfecture ou d’un syndicat de policiers. La personne blessée ou abattue, que ce soit le conducteur ou son passager, ont forcément un petit passif avec la loi qui ne justifie pas mais quelque part explique, pourquoi il a fini à l’hôpital ou à la morgue. Il ne doit surtout…

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Auteur: lundimatin