Les politiques restent sourds à la critique de la croissance

Politique
Économie

Élodie Vieille Blanchard est agrégée de mathématiques et docteure en sciences sociales. Elle a soutenu en 2011 à l’EHESS une thèse d’histoire des sciences sur les limites à la croissance. Elle est également la présidente de l’Association végétarienne de France.


Il y a cinquante ans était publié aux États-Unis le rapport sur Les Limites à la croissance. Cet ouvrage, rédigé par une équipe de chercheurs du prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT), s’appuyait sur un modèle mathématique du monde pour étayer une conclusion radicale, illustrée par des graphiques éloquents : si rien n’était fait pour stabiliser délibérément la population et la production industrielle à l’échelle du monde, le système planétaire allait inévitablement s’effondrer et ce, quels que soient les aménagements technologiques mis en place, du fait de l’épuisement des ressources ou de l’explosion des pollutions.

La publication du rapport, diffusé très massivement en Occident, a déclenché de fortes réactions de rejet aussi bien dans la sphère politique (chez des représentants de toutes sensibilités) que dans le monde académique, en particulier chez les économistes. La contestation des conclusions du rapport a débouché très rapidement sur la cristallisation du projet de développement durable, qui a structuré les discours industriels et politiques, tout en colonisant nos visions du monde. En somme, le message de bon sens du rapport des Limites, à savoir qu’en produisant toujours plus, on polluait plus et on épuisait plus vite les ressources naturelles, a été obscurci et remplacé par des incantations qui donnaient à imaginer un avenir opulent et soutenable en même temps, selon la terminologie adoptée.

Au cours des dernières décennies, on a ainsi pu assister à une floraison de déclamations politiques sur la nécessité de prendre à bras le corps le sort de la planète (d’un Chirac qui s’alarmait d’une « planète qui brûle » au « Make our planet great again » d’un Macron), chez ceux-là mêmes qui se faisaient par ailleurs les chantres de la croissance économique. Au sein des grandes entreprises, les engagements de laver plus vert que vert ont également pullulé, déconnectés de la réalité matérielle du monde, comme s’il suffisait de déclarer des intentions vertueuses pour faire disparaître les dégâts des productions sur les écosystèmes.

« Ces engagements n’ont débouché sur aucun changement véritable »

Dans le même temps,…

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Auteur: Reporterre