Les Rascals, histoire des lascars

Les Rascals est un film de Jimmy Laporal-Trésor, sorti en janvier 2022. Il y est question d’une bande des années 80, d’un machisme adolescent, d’une menace néo-nazie à Paris, d’affrontement avec les fachos, d’un infernal cercle de vengeances, d’un souffle radical dans le paysage citoyenniste du cinéma français. Signé X l’a vu, il nous raconte.

Les années 80

Le film s’ouvre avec les images documentaires de Gilles Elie Cohen (Vikings et Panthers, 1982). Des photos remarquables qui transmettent – dans la posture des corps, les ambiances et les cadrages – quelque chose de spécifique à la jeunesse des années 80. Mais le film ne parvient pas à s’imprégner de cette atmosphère contre-culturelle dont les photos témoignent.

Souvent cadrés dans des plans rapprochés, les personnages évoluent « en région parisienne » dans un environnement sans lieux. On ne sait pas où ils habitent, quel est leur territoire, où se trouve l’immeuble de Rudy et le café de Manu. On sent l’embarras du réalisateur : comment montrer la banlieue sans ses barres d’immeubles typiques qui renvoient au présent ? C’est pourtant l’importance des lieux – où les gens se donnent rendez-vous dans un monde sans téléphone portable – qui aurait pu caractériser le Paris des années 80.

Malgré la musique, les coupes à la Elvis et les costumes, les années 80 semblent fausses – on y croit pas vraiment. Le contemporain colle aux personnages. Pourquoi ? Parce que, contrairement à la croyance du film dans la capacité du décor et des costumes à faire croire – dans la mystification cinématographique – c’est l’éthique qui resurgit : les gestes et les manières des acteurs sont ceux d’aujourd’hui.

Une ambition du film était de montrer une « bande », cette forme-de-vie collective des années 80. Mais les rapports entre les membres des Rascals, la façon dont ils se touchent, marchent, se parlent (malgré un code de langage un peu surfait) ressemblent trop aux bandes contemporaines.

Cette volonté de mettre en scène la bande des années 80 « par l’extérieur », (décors, costumes etc.) pousse le film dans deux erreurs scénaristiques : d’abord il emprunte, pour satisfaire les ressorts narratifs du « film de banlieue », les problématiques sociales des quartiers populaires contemporains : la détresse de la mère, l’absence du père, la réussite du petit frère mis en concurrence avec le parcours du grand frère en prison etc. Les spectateurs se retrouvent pris au piège de l’actualité…

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Auteur: dev