Les ressources du Groenland, entre protection de l’environnement et tentation du profit

Le Groenland est au cœur de l’intrigue dans la série danoise Borgen, le pouvoir et la gloire, qui fait suite aux trois saisons de Borgen. Une femme au pouvoir (diffusée avec succès dans plus de 60 pays), une saga qui s’inscrit dans la lignée des séries politiques, de West Wing à House of Cards. Les scénaristes imaginent qu’on découvre une forte réserve de pétrole dans le sous-sol du Groenland, ce qui attise les appétits des investisseurs et des grandes puissances.

Ce « pays vert », vaste territoire de près de 2,2 millions de kilomètres carrés, est rattaché au Danemark de longue date, rattachement souvent mal vécu par les habitants, après avoir même été une colonie danoise jusqu’en 1953. En 1979, l’île a accédé au statut de « territoire autonome » et son économie dépend toujours fortement des subsides versés par Copenhague.

Si certains Groenlandais réclament une autonomie plus grande voire l’indépendance, et dénoncent une « colonisation » danoise (effectuée dès le XVIIIe siècle par des missionnaires danois comme Hans Egede, surnommé « l’Apôtre du Groenland » et fondateur de la ville de Nuuk, aujourd’hui capitale du territoire), la population locale de 57 000 habitants se trouve dans une situation difficile, marquée par la corruption et un taux de suicide élevé chez les Groenlandais, affectés souvent par la dépression, l’alcoolisme et le désespoir lié au climat gris et froid et au manque de perspectives.

Des matières premières convoitées

Le Groenland, à l’heure du réchauffement climatique et de la fonte des glaces (sa calotte glaciaire a perdu 4,7 millions de milliards de litres d’eau depuis 2002), est devenu un territoire de plus en plus convoité, notamment pour ses réserves d’eau très pure.

À tel point que certains entrepreneurs, voyant dans ce trésor une manne financière juteuse, vont jusqu’à vendre cette eau au même prix que des grands vins de Bordeaux, comme l’explique un article du journal Le Monde. « Il les vend jusqu’à 12 euros l’unité la [bouteille], en Chine, dans les pays du Golfe, aux États-Unis ou encore au Danemark. La marque Inland Ice, distribuée aussi dans les restaurants gastronomiques, promet une eau qui a « la pureté de la préhistoire » et le « goût d’il y a cent mille ans ». M. Vildersboll, qui travaillait auparavant dans l’industrie pétrolière, y voit un « nouveau pétrole ».

Brise-glace dans l’Arctique.
Koptyaev Igor/Shutterstock

Outre cet « or bleu », le Groenland regorge de richesses minières dans son sous-sol, comme le fer, le nickel, l’or et les métaux rares, comme le cobalt, très convoitées aujourd’hui car nécessaires à la fabrication des téléphones portables. Jeff Bezos et Bill Gates sont d’ailleurs sur le coup, toujours selon Le Monde :

« KoBold Metals, l’entreprise dont ils sont actionnaires et qui utilise l’intelligence artificielle pour explorer de nouveaux gisements, a lancé, en mars, ses premiers forages près de la baie de Disko, dans le sud-ouest du pays, afin d’y prospecter du nickel, du cuivre et du cobalt. »

L’île contient également de l’uranium, un gisement de rubis et de la farine de roche, boue riche en limon qui pourrait, « selon les recherches d’un géologue danois, contribuer à rendre fertiles des régions arides dans le monde ».

Enfin, le Groenland recèle d’importants gisements de sable, précieux alors que le sable qui vient à manquer est très convoité pour la construction de bâtiments.

Le Groenland, dont le nom signifie « pays vert », pourrait par ailleurs profiter du réchauffement climatique pour se lancer dans l’agriculture.

Au cœur d’enjeux géopolitiques majeurs

Le pays est aussi le centre d’enjeux géopolitiques majeurs : en effet, comme l’analyse le journaliste Julien Bouissou, « dans une région qui fait officiellement partie de la sphère d’influence américaine depuis la doctrine Monroe de 1823, et la signature d’un traité entre Copenhague et Washington en 1951, l’industrie minière peut servir de cheval de Troie à l’influence chinoise ».

[Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. Abonnez-vous aujourd’hui]

L’île est convoitée à la fois par les…

La suite est à lire sur: theconversation.com
Auteur: Chloé Maurel, SIRICE (Université Paris 1/Paris IV), Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne