Agrégé et docteur en philosophie, Bertrand Cochard enseigne la philosophie esthétique à l’École municipale d’arts plastiques de Nice (Villa Thiole). Il vient de publier Vide à la demande, aux éditions L’Échappée, dans lequel il explore les effets délétères des séries sur nos existences.
Reporterre — « C’est parce que l’on travaille trop que l’on regarde trop de séries », écrivez-vous dès les premières pages de votre livre. Pourquoi ?
Bertrand Cochard — La première raison est presque d’ordre attentionnel. Le propre de la série, selon moi, c’est de constituer une activité facilement accessible à la fin de la journée, précisément au moment où notre temps de travail a dilapidé notre énergie, notre attention et notre disponibilité.
La deuxième, c’est qu’il y a eu dans les sociétés modernes une révolution extrêmement importante, entre la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle. Cette révolution, c’est la mise en place du système marchand et du salariat. Cela nous a amenés à considérer que notre temps libre était un moment libéré par le travail. Sur le site du ministère de l’Économie, on peut par exemple lire qu’un salarié doit travailler pendant un mois pour produire 2,5 jours de congés.
Comprendre les séries est important, puisque considérer le temps libre comme un temps que le travail libère affecte notre manière de l’éprouver. Si vous vous êtes embêté à produire ce temps libre, à l’arracher au temps de travail, bien évidemment vous n’allez pas ne rien en faire. C’est comme si était inscrite, dans notre conception du temps libre, l’impossibilité même de l’ennui. Les séries viennent remplir ce temps-là.
Vous développez l’idée selon laquelle les séries « séquencent » notre temps, que voulez-vous dire par là ?
Avec ce texte, je cherchais à faire connaître les thèses de [l’écrivain et théoricien] Guy Debord. Ce qu’il appelle « la…
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Auteur: Hortense Chauvin