Les stratégies d'Aurélie Trouvé contre le capitalisme

« La violence première est celle de l’exploitation du travail, de l’impunité des évadés fiscaux ou des agresseurs sexuels, de la répression et des bavures policières » : cette justification de l’autodéfense populaire face aux oppressions n’est pas tirée des écrits du philosophe libertaire Peter Gelderloos (Comment la non-violence protège l’État, Libre), de la philosophe féministe Elsa Dorlin (Se défendre. Une philosophie de la violence, La Découverte) ou d’un quelconque tract anarchiste, mais du Bloc arc-en-ciel, le dernier ouvrage d’Aurélie Trouvé, jusqu’à récemment porte-parole d’Attac France. Certes, l’autrice n’appelle pas explicitement à l’insurrection à venir, mais qualifier « la diversité des formes d’organisation et des tactiques », revendiquée par les mouvements insurrectionnels, d’« atout stratégique majeur », marque un pas qu’Attac n’aurait peut-être pas franchi cinq ou dix ans plus tôt. 

Et pour cause. Le paysage politique a radicalement changé durant les années 2010, avec, dans le cas français, une accélération dans la seconde moitié de la décennie. Ce basculement a eu lieu sous les quinquennats de François Hollande et d’Emmanuel Macron. Pour les lecteurs férus d’histoires militantes et révolutionnaires, le livre d’Aurélie Trouvé semblera n’apporter aucun élément neuf sur le sujet. Et pourtant, il témoigne d’un fait historique : l’acceptation par une partie des organisations associatives, syndicales, voire politiques, sous l’autoritarisme présidentiel et les gaz lacrymogènes, de l’idée de la diversité des tactiques.

Lors de la marche climat du 21 septembre 2019.

En lisant Le bloc arc-en-ciel, on mesure à quel point le gouvernement d’Emmanuel Macron a été violent — et combien, face à cet inhabituel degré de répression, le mouvement social français a dû se réinventer. Pour son bien ; comme le note Aurélie Trouvé, « la faiblesse de la gauche dans les urnes » que l’on constate tous « est [pourtant] contemporaine d’une certaine vitalité retrouvée des mouvements sociaux et des réseaux de résistance et de solidarité ». Pour l’illustrer, l’autrice égrène les différentes batailles du conflit social de ces dernières années : des échecs riches d’enseignements — la loi Travail, ses cortèges de tête et Nuit Debout en 2016, les communes étudiantes et la longue grève des cheminots en 2018 —, des demi-succès — le report sine die de la réforme des retraites en 2020 —, mais aussi de…

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Auteur: Reporterre