Les vaccins à ARN, une nanotechnologie en plein essor

Mardi 17 janvier, Moderna a annoncé avoir obtenu des résultats préliminaires positifs lors d’un essai de phase 3 visant à évaluer l’efficacité, chez les personnes âgées, d’un vaccin à ARN messager (ARNm) dirigé contre le virus respiratoire syncytial (VRS), responsable de la bronchiolite.

La pandémie due au coronavirus SARS-CoV-2 avait déjà révélé le formidable potentiel de ce type de vaccins. Développés en quelques mois, ils ont rapidement permis de contenir les vagues successives de Covid-19, et de limiter leurs dégâts.

Au cœur de ce succès se trouve, bien entendu, la molécule d’ARNm. Mais tout le crédit ne lui revient pas : d’autres actrices, moins connues, contribuent largement à l’efficacité de ces vaccins. Il s’agit des nanoparticules lipidiques, qui non seulement « encapsulent » l’ARNm pour le protéger et le transporter, intact, à l’intérieur des cellules, mais exacerbent aussi la réponse immunitaire. Ce qui présente des avantages, mais également certains inconvénients. Explications.

L’ARN ne fait pas tout

Alors que les vaccins classiques contenaient des fragments du virus contre lequel on cherchait à « éduquer » le système immunitaire (ou bien ledit virus « inactivé » ou « atténué »), les vaccins à ARNm ne contiennent qu’un « plan de montage » : la molécule d’ARNm. Après injection, celle-ci pénètre dans les cellules où elle sera lue et utilisée pour fabriquer un fragment de virus qui stimulera les défenses immunitaires (l’« antigène », terme désignant un élément reconnu comme étranger par l’organisme). Ainsi « éduqué », le système immunitaire sera prêt à réagir s’il devait, plus tard, croiser le virus lui-même.

Les molécules d’ARNm sont donc centrales dans les vaccins à ARN. Mais seules, elles ne serviraient pas à grand-chose. Très fragiles, elles se dégradent en effet très rapidement, en particulier en présence d’enzymes, très nombreuses dans notre organisme.

Pour les protéger et s’assurer qu’elles arrivent à bon port après injection, les ARNm sont « emballés » dans de minuscules « nanocapsules » lipidiques. Les vaccins à ARN sont donc des « nanovaccins ». Précisons que ces nanoparticules lipidiques n’ont rien à voir avec les nanoparticules toxiques qui font actuellement débat.

Les nanoparticules vaccinales sont constituées de quatre éléments essentiels :

  • des lipides ionisables, chargés positivement, qui se lient aux charges négatives de l’ARN messager ;

  • des phospholipides (des constituants essentiels des membranes cellulaires) ;

  • du cholestérol (autre constituant essentiel des membranes cellulaires, en association avec les phospholipides)  ;

  • des lipides conjugués à des chaînes de polyéthylène glycol, qui stabilisent l’ensemble.

Structure d’une particule lipidique.
Michael D. Buschmann M. D. et al (2021) « Nanomaterial Delivery Systems for mRNA » — Vaccines

In vivo, les lipides ionisables qui constituent les nanoparticules vaccinales permettent à celles-ci d’entrer dans la cellule en étant internalisées dans des sortes de vésicules appelées endosomes. Une fois dans la cellule, l’ARN est libéré, lu et traduit en protéines. Reconnues étrangères par l’organisme, ces dernières déclenchent la réponse vaccinale.

Les nanoparticules lipidiques protègent donc l’ARN d’une dégradation rapide et assurent sa captation par les cellules au site d’injection. Elles exercent aussi d’autres actions déterminantes pour l’efficacité des vaccins à ARN. Mais elles sont aussi impliquées dans certains de leurs effets indésirables.

Effet adjuvant et stimulation des réponses immunes

Comme tout vaccin, les vaccins à ARN doivent stimuler les cellules immunitaires appelées « cellules présentatrices d’antigène » pour qu’une réponse immune efficace se développe.

Dans les vaccins classiques basés sur des protéines antigéniques, cette action de stimulation des cellules présentatrices d’antigène est exercée par un adjuvant présent dans le vaccin. Les vaccins à ARN sont quant à eux dépourvus d’adjuvant, car ce rôle est joué par les lipides chargés positivement qui font partie des nanoparticules.

L’effet adjuvant des nanoparticules lipidiques aboutit à une stimulation robuste des…

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Auteur: Michel Goldman, Président de l’institut I3h, Université Libre de Bruxelles (ULB)